Prières de Sainte Catherine de Sienne XIX, XX, XXI

XIX – Prière faite à Rome, le jour de la Chaire de saint Pierre, apôtre.

1. J’ai recours à vous, Médecin suprême, Amour inexprimable de mon âme; je soupire avec ardeur vers vous, Trinité éternelle, infinie, moi si peu de chose! Je m’adresse à vous dans le corps mystique de votre sainte Église pour que vous purifiiez par votre grâce toutes les taches de mon âme. Ne tardez pas davantage, je vous le demande par les mérites de saint Pierre, que vous avez chargé de conduire votre Barque. Secourez votre Épouse, qui espère dans le feu de votre charité et l’abîme de votre admirable sagesse.

2. Ne méprisez pas les désirs de vos serviteurs, mais dirigez vous-même la Barque sainte. Vous qui faites la paix, attirez à vous tous les fidèles; dissipez les ténèbres de l’orage, afin que l’aurore de votre lumière brille sur les champs de votre Église et y ramène le zèle pour le salut des âmes. O Père tendre et miséricordieux, vous nous avez donné des liens pour enchaîner le bras de votre justice; ce sont les humbles prières et les ardents désirs de vos ardents serviteurs, que vous avez promis d’exaucer, lorsqu’ils vous demanderaient d’avoir pitié du monde.

3. Je vous rends grâces, Ô Dieu puissant et éternel, du repos que vous voulez bien promettre à votre Épouse. Oui, j’entrerai dans ses jardins et je n’en sortirai pas avant d’avoir vu l’accomplissement de vos promesses qui ne trompent jamais. Effacez aujourd’hui nos péchés, Seigneur, et purifiez nos âmes avec le Sang que votre Fils unique a versé pour nous, afin que, la joie Sur le visage et la pureté tians l’âme, nous lui rendions amour pour amour, en mourant à nous-mêmes et en vivant pour lui.

4. Exaucez aussi les prières que nous vous adressons pour le Pontife qui garde la Chaire sacrée dont nous célébrons la fête; rendrez-le l’imitateur et le digne successeur de votre petit vieillard Pierre (Il succesore di questo tuo vecchiacciuolo di Petro.), et donnez-lui tout ce qui lui est nécessaire pour gouverner l’Église. Vous le savez, vous avez promis de satisfaire bientôt mes désirs: ainsi je m’adresse à vous avec confiance, mon Dieu; ne tardez pas davantage à accomplir vos promesses.

5. Et vous, mes frères bien-aimés, travaillons, tandis que nous le pouvons, pour l’Église du Christ, qui est notre mère dans la foi. Vous avez été placés dans l’Église comme ses colonnes; aidez-la de vos ferventes prières et de vos œuvres; détruisez eu vous tout amour-propre et toute paresse. Cultivons avec ardeur le champ sacré de la Foi, afin que nous accomplissions la volonté de Dieu, qui nous a donné cette tâche pour notre salut, pour celui des autres, et pour l’unité de l’Église, qui doit être le salut de nos âmes.

XX – Prière faite à Rome, le 26 mars 1379.

1. O Dieu éternel, souveraine Grandeur, vous êtes grand, moi je suis petite. Ma bassesse ne peut atteindre votre Grandeur qu’autant que la volonté, l’intelligence, la mémoire, surmontent la faiblesse de mon humanité pour vous contempler dans la lumière que vous m’avez donnée. Si je regarde votre Grandeur, toute grandeur que mon âme peut atteindre en vous est comme la nuit obscure comparée aux clartés du jour, ou comme les reflets de la lune comparés au disque éclatant du soleil. Je puis bien vous posséder par l’amour, mais je ne puis vous voir dans votre essence: vous avez dit que l’homme vivant ne peut vous voir.

2. Oui, l’homme vivant dans sa sensualité et sa volonté ne peut vous voir dans l’union de votre charité; celui qui vit dans la rectitude de la raison peut vous voir dans l’union de votre charité, mais il ne peut vous contempler dans votre essence tant qu’il habite son corps mortel. Il est donc bien certain que je ne puis vous atteindre, mais seulement jouir de vous comme dans un miroir, c’est-à-dire dans les effets de votre charité, et non dans votre essence.

3. Et quand ai-je pu prétendre à ce bonheur de vos adorateurs véritables, à ce bonheur incompatible avec ma vie mortelle? Lorsque arriva le moment sacré, le temps vraiment acceptable, où mon âme put voir dans la lumière l’accomplissement des promesses; lorsque vint au monde le grand Médecin, votre Fils unique; lorsque l’Époux fut uni à l’Épouse, et le Verbe-Dieu à notre humanité. Cette union s’est faite par Marie, car c’est elle qui vous a revêtu de sa chair, vous qui êtes l’éternel Époux!

4. Cette union ineffable était cachée d’abord; peu la connaissaient, et l’âme ne pouvait comprendre toute votre grandeur; mais l’âme eut la connaissance parfaite de votre charité dans la Passion du Verbe (Il ne s’agit pas d’une connaissance parfaite, absolue mais de la connaissance dont parle saint Jean dans sa première Épître, III, 16: In hoc cognovimus charitatem Dei, quoniam ille animan suam pro nobis posuit.). Alors le feu caché sous notre cendre se manifesta et produisit ces grandes flammes qui atteignirent le corps sacré du Sauveur sur l’arbre de la Croix. Pour que l’affection de l’âme fût attirée aux choses d’en haut, pour que l’œil de l’intelligence pût vous contempler dans ces flammes, ô Verbe éternel, vous avez voulu être élevé sur le Calvaire, et le sang que vous y avez versé nous a prouvé votre amour, votre miséricorde et votre générosité infinie. Vous nous avez aussi montré, par ce Sang, combien vous est odieuse et pesante la faute de l’homme. Vous avez purifié dans ce Sang l’âme, l’épouse que vous avait donnée l’union de votre divinité à notre humanité. Ce Sang a été un vêtement pour sa misère, et votre mort lui a rendu la vie.

5. O Passion désirable, mais qui ne peut être désirée ni aimée par ceux qui se désirent, s’aiment encore eux-mêmes! Passion que désire celui qui s’est dépouillé de lui-même pour se revêtir de vous, et qui a connu par votre lainière la grandeur de votre charité! Passion douce et profitable, qui donnez à l’âme la paix nécessaire pour traverser les flots d’une mer orageuse! Passion, la suavité, la douceur même, richesse de l’âme, repos des affligés, nourriture de ceux qui ont faim! vous êtes le port et le paradis de nos âmes! notre joie véritable, notre gloire, notre béatitude! Celui qui se glorifie en vous possède tout ce qu’il doit posséder. Et qui est-ce qui se glorifie en vous? Ce n’est pas celui qui abaisse la lumière de sa raison aux caprices-de ses sens: celui-là ne peut voir que ta terre.

6. O Passion qui guérissez toute maladie, pourvu que le malade consente à sa guérison, car vos bienfaits ne nous ôtent pas la liberté, vous rendez la vie aux morts et vous délivrez l’âme qui est tombée dans les pièges du démon si le monde nous poursuit, si notre fragilité nous accablé, vous êtes notre refuge. L’âme, en voyant les douleurs du Calvaire, connaît l’immensité de la charité divine que cette Passion lui révèle, et elle en est enivrée. La faiblesse que le Verbe emprunte à notre humanité pour souffrir est un miracle de grandeur et de puissance, puisqu’elle vient de Dieu, qu’elle nous élève à Dieu et qu’elle fait ce que rien ne pourrait faire.

7. O divine Passion! l’âme qui se repose en vous meurt à la sensualité, en goûtant le charme de votre amour. Qu’elle est grande, qu’elle est suave la douceur qu’elle trouve lorsqu’elle pénètre cette dure enveloppe sous laquelle se cachent la lumière et le feu de la charité, lorsqu’elle voit l’admirable union de la Divinité avec l’humanité qui seule souffre en notre Sauveur! Regarde, mon âme, contemple le Verbe dans notre humanité comme dans un nuage qui l’environne; la Divinité n’est pas plus blessée par ce nuage de notre humanité que le soleil ne l’est par les nuages qui voilent ses splendeurs et nous cachent la pureté du ciel. Oui, la divinité du Verbe assista aux souffrances de son corps mais après sa Résurrection, elle changea en lumière les ténèbres de son humanité et la rendit immortelle.

8. O Passion, vous êtes la doctrine que doit suivre la créature raisonnable; vous montrez combien s’égarent ceux qui préfèrent les plaisirs aux peines; puisqu’on ne parvient au Père que par le Verbe, et qu’on ne s’associe au Fils qu’en aimant ses souffrances. Si l’homme veut éviter la souffrance, il l’endurera malgré lui; s’il consent à la porter avec le Soleil de justice, il n’en souffrira pas plus que la Divinité n’a souffert dans le Verbe les douleurs de la Passion acceptée volontairement. Depuis votre Passion, ô Verbe de Dieu, l’âme ne peut avec la lumière de la grâce connaître l’étendue de votre charité; et c’est par cette lumière, qui nous est donnée dans le temps, que nous parviendrons à connaître votre essence dans l’éternité.

9. O Dieu aimable, Dieu éternel, Sublimité infinie, nous ne pouvions élever à votre hauteur, ni les affections de notre âme à cause de leur bassesse, ni les regards de notre intelligence à cause des ténèbres du péché; mais vous qui êtes le Médecin suprême, vous nous avez donné le Verbe avec son humanité; vous avez gagné l’homme, vous avez vaincu le démon, non par l’humanité mais par la Divinité. En vous faisant petit, vous avez grandi l’homme: vous vous êtes abreuvé d’outrages pour le remplir de béatitude; vous avez souffert la faim pour le rassasier de charité; vous vous êtes dépouillé de la vie pour le revêtir de la grâce; vous vous êtes couvert de honte pour lui rendre l’honneur; vous vous êtes caché dans votre humanité pour lui donner la lumière; vous vous êtes étendu sur la Croix pour l’embrasser; vous lui avez ouvert votre côté pour lui offrir un asile contre ses ennemis, et lui faire connaître votre amour, dont l’étendue n’a pas de bornes. C’est là qu’il a trouvé la piscine salutaire qui a guéri son âme de la lèpre du péché.

10. O Amour ineffable, ô Flamme, ô Abîme de charité, Grandeur qu’on ne peut mesurer, plus je vous contemple dans votre Passion, plus je rougis de la misère de mon âme qui ne vous a jamais connu, et cela parce qu’elle vivait pour les sens et qu’elle était morte à la raison. Mais que votre admirable charité illumine aujourd’hui mon intelligence, l’intelligence de ceux que vous m’avez confiés, et celle de toutes les créatures raisonnables. O Dieu, mon Amour, lors que le monde se mourait dans la faiblesse, vous lui avez envoyé pour le guérir votre Fils unique, et je sais que vous le lui avez envoyé à cause de votre amour, et non à cause de nos mérites.

11. Maintenant le monde s’affaisse dans la mort, et mon âme n’en peut supporter le douloureux spectacle. Quel moyen prendrez-vous pour le ranimer, puisque vous ne pouvez plus souffrir et que vous ne descendrez plus des cieux pour nous racheter, mais pour nous juger? Comment nous rendrez-vous la vie? Je crois, ô Bonté infinie, que les remèdes ne vous manquent pas; je sais que votre amour pour nous est toujours le même, et que votre puissance n’est pas plus affaiblie que votre sagesse. Vous voulez, vous pouvez, vous connaissez ce qui peut nous sauver. Je vous en supplie, montrez-moi ce remède, afin que mon âme ranimée reprenne courage.

12. Il est vrai que votre Fils ne doit plus venir que dans la majesté du jugement: mais vous avez des serviteurs que vous appelez vos Christs; et avec eux vous pouvez sauver le monde et lui rendre la vie, parce qu’ils marchent avec courage sur les traces de votre Fils, parce qu’ils brûlent du désir de vous glorifier, de sauver les âmes, et qu’ils supportent avec patience les peines, les tourments, les opprobres et les injures. Ces peines finies, accompagnées d’un désir infini, vous feront exaucer leurs prières, accomplir leurs désirs. S’ils souffraient corporellement sans ce désir infini, leurs souffrances ne pourraient suffire ni à eux ni aux autres, comme la Passion du Verbe sans la Divinité n’aurait pas suffi au salut du genre humain.

13. Sauveur par excellence, donnez-nous donc des Christs pour qu’ils répandent leur vie pour le salut du monde dans les jeûnes, les veilles et les larmes. Vous les appelez vos Christs parce qu’ils deviennent semblables à votre Fils unique. O Père éternel, sauvez-nous de notre ignorance, de notre aveuglement, de notre froideur, Que nous ne restions pas dans cette obscurité où nous ne voyons que nous-mêmes; mais faites-nous connaître votre volonté. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi! Je vous remercie de ce que vous avez donné le repos à mon âme, en lui faisant connaître, dès ici-bas, la grandeur de votre charité et le moyen que vous avez pour délivrer le monde de la mort.

14. Réveille-toi donc, ô mon âme, secoue ce sommeil qui a duré toute ta vie! O Amour ineffable! ce que souffrent vos serviteurs devient méritoire par le désir de leur âme, et le désir de leur âme devient méritoire par le désir de votre charité infinie! O âme malheureuse qui ne suis pas la lumière, mais les ténèbres, sors, sors donc de ces ténèbres éveille-toi, ouvre les yeux de ton intelligence et regarde l’abîme de la charité divine, sans voir, tu ne peux pas aimer; et plus tu verras, plus tu aimeras; plus tu aimeras, plus tu suivras et te revêtiras sa volonté. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

XXI – Prière faite à Rome, le Jeudi 5 Avril 1379.

1. O notre Résurrection! notre Résurrection! puissante et éternelle Trinité, faites donc éclater mon âme! O Rédempteur! notre Résurrection! Trinité éternelle! Feu qui brûlez toujours, qui ne vous éteignez jamais, qui ne pouvez diminuer quand même vous vous communiqueriez à toute la terre! O Lumière qui donnez la lumière, je vois dans votre lumière, et je ne puis rien voir sans vous, parce que vous êtes Celui qui êtes, et moi je suis celle qui ne suis pas! Je connais par vous mes besoins, ceux de l’Église et du monde! C’est parce que je les connais que je vous conjure d’ébranler, d’enflammer mon âme pour le salut du inonde; non pas que je puisse porter quelque fruit par moi-même, mais je le puis par la vertu de votre charité, qui est la source de tout bien.

2. Oui, dans l’abîme de votre charité, l’âme agit pour son salut et pour celui de prochain, comme votre Divinité, ô éternelle Trinité, nous a sauvés au moyen de notre humanité bornée, qui nous a procuré un bien infini. C’est par cette vertu toute puissante de votre Divinité qu’a été créé tout ce qui participe à l’être, et qu’a été donné à l’homme le bien spirituel et temporel qui se trouve en lui. Ce bien, vous avez voulu que l’homme le cultivât par son libre arbitre.

3. O Trinité, Trinité éternelle! votre lumière nous fait connaître que vous êtes le Jardin parfait qui renfermez les fleurs et les fruits. Vous êtes une Fleur de gloire qui vous glorifiez et qui fructifiez vous-même! Vous ne pouvez rien recevoir d’un autre: sans cela vous ne seriez pas le Tout-Puissant, l’Éternel! Celui qui vous donnerait ne paraîtrait pas venir de vous. Mais vous êtes votre gloire et votre fruit; ce que vous offre votre créature vient de vous; si elle ne recevait rien, elle ne pourrait rien vous rendre.

4. O Père éternel! l’homme était renfermé dans votre sein; vous l’avez tiré de votre sainte pensée, comme une fleur où se distinguent les trois puissances de l’âme. Dans chacune de ces puissances, vous avez mis un germe afin qu’elles puissent fructifier dans votre jardin et vous rendre le fruit que vous lui avez donné. Vous entrez dans l’âme pour la remplir de votre béatitude, et l’âme y est comme le poisson dans la mer et la mer dans le poisson.

5. Vous lui avez donné la mémoire afin qu’elle puisse retenir vos bienfaits polir fleurir à la gloire de votre nom et porter de bons fruits, Vous lui avez donné l’intelligence afin qu’elle connaisse votre vérité et votre volonté qui veut toujours notre sanctification, et que, la connaissant, elle vous honore et produise des vertus! Vous lui avez donné la volonté afin qu’elle puisse aimer ce que l’intelligence a vu et ce que la mémoire a retenu.

6. Si je regarde en vous, qui êtes la Lumière, ô Trinité éternelle, je vois que l’homme a perdu la fleur de la grâce par la faute qu’il a commise. Il ne pouvait dès lors vous rendre gloire et atteindre le but pour lequel vous l’aviez créé. Votre plan était détruit; votre jardin était fermé, et nous ne pouvions recevoir vos fruits. Alors vous avez envoyé le Verbe, votre Fils unique, à notre secours.

7. Vous lui avez donné la clef de la Divinité et de l’humanité réunies pour nous ouvrir la porte de la grâce; la Divinité ne pouvait l’ouvrir sans l’humanité, parce que l’humanité l’avait fermée par la faute du premier homme; et l’humanité seule ne pouvait ouvrir sans la Divinité, parce que son action est finie et que la faute avait été commise contre la perfection infinie. La satisfaction devait égaler la faute; tout autre moyen ne pouvait suffire. Et vous, doux et humble Agneau, vous nous avez ouvert les portes du jardin céleste; vous nous livrez l’entrée du paradis et vous nous offrez les fleurs et les fruits de l’éternité.

8. Je comprends maintenant la vérité de ce que vous disiez, lorsque vous êtes apparu sous la forme d’un pèlerin à vos deux disciples, sur la route d’Emmaüs. Vous leur disiez qu’il fallait que le Christ souffrit et qu’il entrât dans la gloire par la voie de la Croix (Luc, XXIV, 26); vous leur citiez les prophéties de Moïse, d’Élie, d’Isaïe, de David, et vous leur expliquiez les Écritures; mais ils ne vous comprenaient pas, parce que les yeux de leur intelligence étaient obscurcis. Mais vous vous compreniez bien, doux et aimable Verbe, et vous saviez où était votre gloire; il vous fallait souffrir pour entrer en vous-même. Ainsi soit-il.

Prières de Sainte Catherine de Sienne XVI, XVII, XVIII

XVI – Prière faite à Rome, le 13 février.

1. O Amour ineffable, doux Amour, Flamme éternelle, Feu qui ne s’éteint jamais! O Dieu, Trinité adorable, vous la Droiture sans défaut, la simplicité sans ombre, la Sincérité sans mensonge, jetez les regards de votre miséricorde sur vos créatures. La miséricorde vous est naturelle; de quelque côté que je me tourne, je ne rencontre que votre miséricorde. Je m’adresse donc à votre miséricorde, et je la demande pour le monde. Vous voulez que nous vous servions selon votre bon plaisir, et vous dirigez vos serviteurs de mille manières. Aussi ne devons-nous pas juger l’intérieur de la créature par ses actes extérieurs; mais nous devons juger la volonté de chacun dans votre volonté, surtout pour vos serviteurs qui lui sont entièrement unis.

2. L’âme est heureuse lorsqu’elle voit la lumière dans votre Lumière. Les moyens que prennent vos serviteurs sont différents; mais, quelle que soit leur route, ils sont toujours dans le chemin de votre ardente charité; sans cela ils ne suivraient pas véritablement votre vérité. Nous en voyons courir dans la voie de la pénitence et s’adonner à la mortification du corps; d’autres marchent dans l’humilité et la destruction de leur volonté; d’autres dans le zèle de la foi; ceux-ci avancent par la miséricorde, ceux-là par l’amour du prochain, auquel ils se sacrifient; et dans tous, l’âme se développe, parce qu’en se servant bien de la lumière naturelle, elle obtient la lumière surnaturelle, qui lui fait voir l’immensité de votre bonté.

3. Oh! comme ils avancent royalement, ceux qui voient en toute chose votre volonté, et qui ne jugent jamais celle de votre créature! O ineffable Charité! ils connaissent et pratiquent parfaitement votre doctrine, puisque vous avez dit: « Ne jugez pas d’après le visage » (Jean, VII, 24). O Vérité éternelle! quelle est votre doctrine, et quelle voie devons-nous suivre pour arriver à votre Père? Je n’en connais pas d’autre que celle que vous avez tracée avec votre Sang précieux, et que vous avez affermie par les admirables vertus de votre ardente charité. C’est là notre chemin; car notre seule erreur est d’aimer ce que vous détestez, et de haïr ce que vous aimez.

4. Aujourd’hui, ô abîme de charité! j’implore votre miséricorde; faites-moi la grâce de suivre votre vérité avec un cœur simple; accordez-moi une faim continuelle de souffrir pour vous les peines et les tourments. Donnez à mes yeux, Ô mon Père, des fontaines de larmes, afin que j’obtienne votre miséricorde pour le monde entier, et surtout pour l’Église votre Épouse.

5. O douce et ineffable Charité, l’Église est le jardin que vous avez fécondé de votre sang et arrosé de celui des martyrs, qui ont généreusement couru après le parfum de votre sacrifice; protégez-la donc. Qui pourrait prévaloir contre la cité que vous défendez? O Père très clément! plongez nos cœurs dans votre Sang, afin qu’ils brûlent d’ardeur pour votre gloire et pour le salut des âmes. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

6. O Dieu éternel! comment parler dignement de vous? Tout ce que nous pouvons dire, c’est que vous êtes notre Dieu, et que vous ne voulez que notre sanctification. Ne l’avez-vous pas montré en nous donnant le sang de votre Fils, qui s’est passionné pour notre salut jusqu’à la mort ignominieuse de la Croix? L’homme ne doit-il pas avoir honte de lever orgueilleusement la tête, lorsque vous, le Dieu très haut, vous vous êtes humilié dans la boue de notre humanité!

7. O Dieu! combien la miséricorde vous est naturelle! L’homme, votre serviteur, l’invoque contre les rigueurs de votre justice, que le monde a méritées par ses péchés. Votre miséricorde nous a créés, votre miséricorde nous mi rachetés de la mort éternelle, votre miséricorde nous couvre et nous protège contre votre justice; elle vous empêche d’ordonner à la terre de s’ouvrir pour nous engloutir, et aux bêtes féroces de nous dévorer: tout est à notre service, au contraire, et la terre nous prodigue l’abondance de ses fruits. C’est votre miséricorde qui règle, qui gouverne tout; c’est elle qui retarde notre mort afin que nous ayons le temps de revenir et de nous réconcilier avec vous.

8. O Père tendre et miséricordieux! qui est-ce qui empêche les anges de punir l’homme, votre ennemi? Votre miséricorde. Elle nous donne aussi les douceurs qui nous obligent à vous aimer, qui séduisent le cœur de votre créature; elle nous envoie les peines et les afflictions qui nous obligent à vous reconnaître, et qui nous font souffrir, afin que vous puissiez couronner ceux qui auront combattu avec courage.

9. C’est elle qui a conservé les cicatrices glorieuses de l’Agneau, votre Fils unique, afin qu’elles intercèdent sans cesse pour nous votre souveraine Majesté. C’est cette miséricorde qui m’a montré si clairement aujourd’hui, à moi, si indigne et si misérable, que je ne puis et ne dois jamais juger les intentions des créatures raisonnables que vous conduisez par des voies si différentes. Vous me l’avez prouvé par moi-même, et je vous en rends grâces.

10. Votre miséricorde n’a pas voulu que l’Agneau sans tache rachetât le genre humain par une seule goutte de son sang, comme il le pouvait; elle a voulu qu’il le donnât tout entier, qu’il souffrît dans tout son corps, afin qu’il satisfit surabondamment pour le genre humain qui vous avait offensé. Et cela pour deux raisons: d’abord parce que, parmi vos créatures raisonnables, les unes vous outragent avec la tête, les autres avec les mains ou avec les autres parties de leur corps; le genre humain avait donc péché par tous ses membres. Puis tout péché vient de la volonté, et sans elle il n’en existerait pas; c’est elle qui dirige tout le corps. Par conséquent, tout le corps de la créature vous avait offensé.

11. Aussi, vous avez voulu que tout le corps et tout le sang de votre Fils unique satisfissent à votre justice, afin que la satisfaction fût complète, et cela par la vertu de la Divinité unie à notre nature humaine, qui seule pouvait souffrir. La Divinité a accepté le sacrifice. O Verbe éternel, Fils de Dieu! comment avez-vous eu la contrition parfaite de la faute, puisque vous n’en avez jamais eu la souillure? Je vois que vous avez voulu satisfaire par les peines de votre esprit et de votre corps, parce que c’était par son esprit et par son corps que l’homme avait péché. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi, et ne regardez pas nos péchés, Dieu tout puissant, Dieu bon et miséricordieux!

XVII – Prière faite à Rome, le 14 février.

1. O Trinité, éternelle Trinité! ô feu, ô abîme de charité ô folie d’amour pour votre créature, Vérité, Sagesse éternelle! Dieu qui vous êtes donné pour notre rédemption, ce n’est pas Votre Sagesse seulement qui est venue au monde; car la Sagesse n’a pas été séparée de la Puissance, la Puissance de la Sagesse et de la Clémence; toute la Trinité était présente. O Trinité éternelle, qu’avez-vous reçu de l’homme, si ce n’est l’outrage? Et quel profit deviez-vous retirer de notre rédemption? Aucun; vous n’avez pas besoin de nous, et vous n’avez été utile qu’à nous. O ineffable Charité, vous avez donné toute votre divinité et toute votre humanité dans votre Incarnation, et vous les donnez encore à l’âme raisonnable, afin que pendant notre pèlerinage nous ne succombions pas à la fatigue, et que nous soyons fortifiés par cette nourriture céleste.

2. Homme mercenaire, à quel prix Dieu veut-il t’acheter? Au prix de sa divinité et de son humanité, qu’il te donne tout entières, sous les blanches apparences du pain. O flamme d’amour, ne suffisait-il pas de nous créer à votre image et ressemblance, de nous faire renaître à la grâce dans le sang de votre Fils? Fallait-il encore nous donner toute la Trinité en nourriture! C’est votre charité qui l’a voulu. O Trinité éternelle, non seulement vous avez donné votre Verbe dans la Rédemption et dans l’Eucharistie, mais vous vous, êtes donnée tout entière par amour pour votre créature. Oui, l’âme vous possède, lorsqu’elle se renonce pour vous, lorsqu’elle ne cherche et ne désire en elle et dans le prochain que la gloire et l’honneur de votre nom, parce que vous êtes la Bonté suprême, que doivent aimer et servir toutes les créatures.

3. Non seulement vous vous révélez aux âmes qui vous aiment ainsi, mais vous les fortifiez contre les assauts du démon, contre les persécutions des hommes et contre les malheurs qui leur arrivent. Vous éclairez leur intelligence par la sagesse de votre Fils, afin qu’ils se connaissent et vous connaissent dans votre lumière. Vous embrasez leur cœur par la clémence du Saint Esprit, et vous accomplissez toutes ces merveilles en eux selon la mesure de leur amour et selon l’usage qu’ils font de leurs facultés.

4. Je vous rends grâces, ô Père éternel, de ce que vous nous montrez aujourd’hui comment peut être réformée l’Église. Vous avez éclairé de votre Verbe l’intelligence de vos créatures; fortifiez maintenant leur volonté, surtout celle de votre Vicaire, afin qu’il suive les lumières que vous lui avez données et que vous devez lui donner. O Trinité éternelle, j’ai péché toute ma vie. Âme misérable, tu as sans cesse oublié ton Dieu; car, si tu ne l’avais pas oublié, tu serais consumée du feu de son amour. O Père éternel, rendez la santé aux malades, la vie aux morts; donnez-leur une voix, afin qu’ils crient vers vous, et qu’ils obtiennent miséricorde pour le monde et pour votre Épouse. C’est avec votre voix même que nous vous implorons, exaucez-nous.

5. Moi, je vous en prie pour tous, pour votre Vicaire surtout et pour ceux qui l’entourent, pour ceux que vous m’avez donnés à aimer d’un amour spécial. Je suis malade et je voudrais les voir en santé; je suis pleine de défauts, et je voudrais les voir parfaits; je suis morte, et je voudrais les voir vivre de la vie de votre grâce. D’où vient tant d’humilité et de miséricorde? Un Dieu s’associer si intimement à sa créature! non seulement unir la nature divine à la nature humaine, mais encore se communiquer aux âmes qui vous aiment et qui vous servent dans la simplicité du cœur! L’homme ne devrait-il pas avoir honte de ne pas se fixer en vous, lorsque vous voulez bien rester en lui de tant de manières? Âme malheureuse, tu ne te souviens pas de ton Dieu, tu ne peux par conséquent t’affermir dans la vertu l’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

6. O Dieu tout puissant, vous êtes la Vie et moi la mort, la Sagesse et moi la folie, la Lumière et moi les ténèbres, l’Infini et moi le néant, la Droiture et moi la fausseté, le Médecin et moi le malade. Qui pourra vous atteindre ô Dieu suprême, pour vous remercier des bienfaits si grands et si nombreux dont vous nous avez comblés? Mais vous nous atteignez par cette lumière que vous versez dans le cœur de ceux qui veulent vous recevoir: vous enchaînez de vos liens ceux qui se laissent enchaîner, ceux qui ne s’opposent point à votre volonté. Ne tardez pas, ô Père très clément, jetez les regards de votre miséricorde sur le inonde: il vous glorifiera plus en recevant votre lumière qu’en restant dans les ténèbres du péché.

7. Tout glorifie votre nom, mais ce sont les pécheurs qui font briller davantage votre miséricorde, lorsqu’elle arrête le glaive de votre justice, et qu’elle donne au coupable le temps de se convertir. Votre gloire paraît dans l’enfer, où votre justice punit les damnés, mais votre miséricorde s’y montre aussi, parce qu’ils n’y souffrent pas tous les tourments qu’ils ont mérités. Là même, votre nom est honoré. Mais que ne puis-je surtout le voir glorifié dans vos créatures, qui vous louent en accomplissant votre volonté, et qui parviennent à la fin pour laquelle vous les avez créées! Faites de votre Vicaire un autre vous-même, et donnez-lui la lumière dont il a si grand besoin puisqu’il doit la répandre sur les autres. O Père très bon et très clément, je vous en supplie, accordez-nous votre douce et éternelle bénédiction.

XVIII – Prière faite à Rome, le 15 février.

1. O Dieu éternel, Dieu éternel, Amour ineffable, en votre lumière j’ai vu la lumière, j’ai connu la lumière; j’ai compris la cause de la lumière, et la cause des ténèbres. Vous êtes la cause de la lumière, et nous, vos créatures, nous sommes la cause des ténèbres. Je sais ce que la lumière fait dans l’âme, et ce qu’y font les ténèbres. O Trinité éternelle, vos œuvres sont admirables; la lumière les fait connaître, parce qu’elles viennent de la lumière. Aujourd’hui, votre Vérité me montre clairement que la cause des ténèbres est l’enveloppe immonde de notre volonté propre et que le moyen de connaître la lumière est de se revêtir de votre douce volonté. Chose admirable! nous sommes dans les ténèbres, et nous voyons la lumière; nous sommes dans le fini, et nous connaissons l’infini; nous vivons dans la mort, et nous connaissons la vie.

2. De même que l’homme se dépouille d’un vêtement et le jette loin de lui, l’âme doit se dépouiller de sa volonté viciée, si elle veut revêtir complètement la vôtre. Pour y parvenir, il faut développer par le libre arbitre cette lumière que nous avons reçue dans le saint baptême, et qui nous fait voir la lumière dans la lumière: Cette lumière, vous nous l’avez montrée sous les voiles de notre humanité. Que reçoit l’âme qui est revêtue de cette lumière? Elle est délivrée des ténèbres, de la soif, de la faim et de la mort. La faim de la vertu chasse la faim insatiable de la volonté: la soif de votre honneur chasse la soif de l’amour-propre, et la vie de votre volonté triomphe de la mort de nos convoitises.

3. O vêtement infect de notre volonté, tu ne couvres pas l’âme, tu causes sa nudité. O volonté détruite, gage de la vie éternelle, tu es fidèle jusqu’à la mort, non pas au monde, mais à ton doux créateur. Tu lies l’âme à lui, parce que tu la détaches d’elle-même. O Amour ineffable, comment l’âme sait-elle qu’elle est parfaitement détachée d’elle-même? Elle le sait lorsqu’elle ne choisit plus le lieu, la manière, le temps qui lui plaisent davantage, mais qu’elle s’en rapporte pour tout à votre bon plaisir.

4. Votre volonté, Seigneur, est un vêtement éblouissant, c’est un soleil; car, comme le soleil éclaire, échauffe et féconde la terre, votre lumière éclaire et échauffe l’âme qui la possède dans le feu de votre charité; elle l’éclaire, parce qu’avec la lumière elle lui fait connaître la vérité dans la lumière de votre sagesse: elle lui fait produire, pendant qu’elle est sur cette terre, le fruit des véritables et saintes vertus. L’âme devient forte par la puissance du Père, prudente par la sagesse du Fils, et capable d’aimer par la clémence du Saint Esprit (Cette dernière phrase ne se trouve que dans la version latine.)

5. Qu’est-ce qui empêche l’âme de se dépouiller d’elle-même? C’est la privation de la lumière. Elle a méconnu la première lumière que vous donnez à toute créature raisonnable, et ne l’a pas développée. Elle a obscurci la vue de l’intelligence par des fautes qui ont enchaîné la volonté, et lui ont fait commettre le mal. O âme ignorante! si tu ne distingues pas la puanteur du péché et les parfums de la vertu et de la grâce, c’est que tu es privée de la lumière. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

6. Dieu éternel, je sais combien vous avez fait la créature à votre ressemblance; de quelque côté que mon intelligence regarde, elle voit que vous l’avez mise comme dans un cercle dont elle ne peut sortir. Si je considère l’être que vous nous avez donné, j’y trouve votre image et votre ressemblance, dans nos rapports avec la sainte Trinité, par les trois puissances de notre âme. Si je considère le Verbe qui nous a fait naître à la grâce, je vois que vous nous ressemblez, et que nous vous ressemblons par cette union ineffable de la divinité et de l’humanité. Si je me tourne vers l’âme que vous éclairez des rayons de votre pure lumière, je vois qu’elle demeure en vous, parce qu’elle suit la doctrine de votre Vérité, et qu’elle pratique les vertus inspirées et prouvées par l’amour qu’elle a pour vous; et c’est vous-même qui êtes cet amour.

7. Dès que l’âme suit votre doctrine par amour, elle devient un autre vous-même. Elle s’est dépouillée de sa volonté pour se revêtir de la vôtre; elle ne demande, elle ne désire que ce que vous demandez et ce que vous désirez en elle. Vous aimez cette âme, et cette âme vous aime; mais vous l’aimez gratuitement, vous l’avez aimée avant qu’elle fût, tandis qu’elle vous aime à cause de vos bienfaits. Il lui est impossible de vous aimer gratuitement comme vous l’aimez, puisqu’elle vous doit tout, et que vous ne lui devez rien. Mais cet amour désintéressé qu’elle ne peut vous rendre, elle doit le rendre au prochain, en l’aimant gratuitement et par devoir. Gratuitement, parce qu’elle doit l’aimer sans intérêt et sans réciprocité; par devoir, parce que vous le lui ordonnez, et qu’elle est obligée de vous obéir.

8. Quelle conformité entre vous et l’âme, lorsqu’elle s’élève à vous par la lumière intellectuelle qu’elle reçoit de vous, et par l’amour divin qu’elle acquiert en se contemplant aux clartés de votre Vérité! Elle vous ressemble, ô Dieu immortel, parce que vous lui faites comprendre et goûter dans l’ardeur de votre charité vos biens immortels. Vous êtes la Lumière, et vous la faites participer à la lumière; vous êtes un feu, et vous vous communiquez vous confondez sa volonté avec la vôtre, et la vôtre avec la sienne. Vous êtes la Sagesse suprême, et vous lui donnez la sagesse; vous lui faites discerner et comprendre la vérité. Vous êtes la Force éternelle, et vous lui donnez la force. Vous la lui donnez si grande, qu’aucune créature ne saurait l’ébranler, si elle ne le veut pas, et elle ne le voudra jamais tant qu’elle sera revêtue de votre volonté: sa seule volonté peut l’affaiblir.

9. Vous êtes infini, et vous la rendez infinie par la conformité que la grâce lui donne avec vous, pendant la vie de son pèlerinage, et pendant la vie de l’éternelle vision. Elle vous est tellement conforme, son libre arbitre vous est tellement uni, qu’elle ne peut plus perdre votre ressemblance. Oui, votre Vérité a dit vrai: toute créature raisonnable devient conforme à vous et vous à elle, par la grâce. Vous ne lui donnez pas une partie de votre grâce, vous la lui donnez tout entière. Pourquoi? Parce que rien ne lui manque -pour son salut. Vous la lui donnez plus ou moins parfaite, selon qu’elle veut développer dans votre lumière la lumière naturelle que vous lui avez d’abord donnée. Que dire encore, sinon que l’homme devient Dieu, et que vous, mon Dieu, vous vous êtes fait-homme?

10. Quelle a été la cause de cette conformité? La lumière a fait connaître à l’âme votre volonté; et parce qu’elle la connaît, elle se dépouille de sa volonté propre, qui causait ses ténèbres, sa mort, sa nudité. Elle se revêt de votre volonté, de vous-même par la grâce, par la lumière, par le feu, par l’union de votre Divinité à notre humanité. Vous êtes la cause de tout bien, tandis que la volonté corrompue de l’amour-propre est la cause de tout mal; et cela parce qu’elle aveugle l’âme, et qu’elle la fait sortir de la sphère lumineuse de la sainte foi où elle vous trouvait toujours. Quelle est alors son union et sa ressemblance? Dès qu’elle abandonne la lumière de la foi, elle ressemble à la brute dépourvue de raison: elle suit la loi corrompue des êtres mauvais, visibles et invisibles, et c’est elle seule qui en est la cause.

11. Oui, je le confesse, Dieu éternel et tout puissant, je suis la cause misérable de tous ces maux, parce que je n’ai pas exercé ma lumière dans votre lumière, pour connaître combien vous déplaît et combien m’est nuisible et mortel ce vêtement de ma propre volonté, ce vêtement dont vous voulez que je me dépouille complètement. Hélas! malheureuse, j’ai méconnu la douceur de votre volonté, que je devais revêtir. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

12. Vous êtes, ô Dieu éternel, la lumière qui nous fait voir la lumière. Je vous supplie de répandre cette lumière sur toutes vos créatures raisonnables, surtout sur le souverain pontife, votre Vicaire, afin qu’il devienne un autre vous-même. Éclairez ceux qui sont dans les ténèbres, et qu’ils connaissent votre vérité. Je vous implore aussi pour ceux que vous avez confiés à mon affection et à ma sollicitude particulière. Qu’ils soient illuminés de vos rayons, qu’ils soient purifiés de leurs fautes, afin qu’ils puissent activement travailler dans le champ que vous leur avez confié. Punissez et vengez sur moi leurs erreurs et leurs faiblesses dont je suis cause. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

13. Je vous remercie, sainte et adorable Trinité, des consolations que vous avez données à mon âme en me faisant connaître la conformité que nous avons avec vous, et en m’expliquant l’excellence de votre volonté. Je suis celle qui ne suis pas, et vous êtes seul Celui qui êtes. Rendez-vous grâces vous-même en me donnant les moyens de pouvoir vous louer. Que votre volonté vous force à faire miséricorde au monde, et à secourir votre Vicaire et votre Église. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi. O Dieu éternel, accordez-nous votre douce Bénédiction. Ainsi soit-il.

Versets abrogeants (nâsikh) & versets abrogés (mansûkh)

Versets abrogeant &  abrogés

La règle de l’abrogation constitue une clé absolument indispensable pour la compréhension du Coran et donc de l’islam. Si on ne connaît pas cette règle fondamentale, on ne peut qu’être déconcerté ou découragé devant les nombreuses contradictions présentes dans le livre saint des musulmans ; on risque également de se faire « rouler dans la farine » lors de discussions avec des musulmans rusés et/ou malintentionnés.

Anne-Marie Delcambre consacre un bref chapitre de son dernier livre [1] à ce thème. Elle rappelle que « dans le cas de deux versets qui se contredisent, pour les spécialistes, le verset révélé en dernier abroge le verset révélé en premier ». Étant donné que dans le Coran les sourates ne sont pas classées dans l’ordre chronologique mais approximativement par ordre de longueur décroissante (de la plus longue sourate à la plus courte, à l’exception de la première sourate), une question se pose inévitablement : en cas de contradiction entre deux versets, comment savoir quel est le verset révélé en dernier ?

Réponse : « Il faut (…) se référer aux études des savants de l’islam pour connaître l’ordre chronologique ». Ceux-ci distinguent les sourates mecquoises (révélées à La Mecque entre 610 et 622) et les sourates médinoises (révélées à Médine entre 622 et 632).

Le principe du verset abrogeant (nâsikh) et du verset abrogé (mansûkh) est contenu dans le Coran lui-même : Sourate 16 (sourate mecquoise, la 70 ème révélée), verset 101 (ou 103) [2] : « Quand Nous remplaçons un verset par un autre – et Allah sait mieux ce qu’Il fait descendre – ils disent : « Tu n’es qu’un menteur. » Mais la plupart d’entre eux ne savent pas. » Sourate 2 (sourate médinoise, 87 ème révélée), verset 106 (ou 100)Si nous abrogeons un verset ou si nous le faisons passer à l’oubli, Nous en apportons un meilleur ou un semblable. Ne sait-tu pas qu’Allah est omnipotent ? » (Allah modifie son message en fonction de son humeur, du temps qu’il fait et de je ne sais quoi encore! C’est très humain comme réaction et disons-le franchement, cela n’a rien d’un dieu sachant tout, voyant tout et ayant la science infinie. Ndlr Gérard Brazon) Quel est l’intérêt de tout ceci ? La règle de l’abrogation a des conséquences pratiques, concrètes. Illustrons-le.

Deux exemples.

Premier exemple : Pourquoi la consommation d’alcool est-elle interdite aux musulmans ? La sourate 16, verset 67 (ou 69) dit pourtant : « Des fruits des palmiers et des vignes, vous retirez une boisson enivrante et un aliment excellent. Il y a vraiment là un signe pour les gens qui raisonnent ».

Pour répondre à la question, il faut savoir que la sourate 16 est une sourate mecquoise (c’est la 70 ème révélée) et qu’elle est abrogée par la sourate 2 (médinoise, 87 ème révélée), verset 219 (ou 216). Celle-ci est abrogée à son tour par la sourate 4 (médinoise, 92 ème révélée), verset 43 (ou 46). Cette dernière enfin est abrogée par la sourate 5 (médinoise, 112ème révélée), verset 90 (ou 92) : « O les croyants ! Le vin, les jeux de hasard, les statues, les flèches de divination sont une abomination inventée par Satan. Écartez-vous-en afin que vous réussissiez. » On a donc ici affaire à une succession de versets qui s’abrogent les uns les autres, et c’est le dernier d’entre eux (chronologiquement) qui a le dernier mot. « D’après le principe de l’abrogation qui régit l’application du Coran, c’est la sourate 5 qui doit guider la conduite du musulman. Il faut donc ne pas consommer d’alcool » [3].

Deuxième exemple : Pourquoi certains, dont je fais partie, déploient-ils autant d’efforts pour dire, à l’encontre de tant d’autres, que l’islam n’est PAS la religion pacifique et tolérante qu’on a coutume de nous décrire ? Le Coran contient bien de nombreux versets « pacifiques », « gentils », « tolérants ». En effet. Mais il en comprend également d’autres, qui sont « intolérants », d’une extrême violence envers les juifs, les chrétiens, les non-croyants. Dès lors, à quels versets se fier ? Il faut une nouvelle fois savoir à quelle période se rapportent les versets en question. Les premiers (tolérants) appartiennent à la période mecquoise, les seconds (violents) à la période médinoise.

Par conséquent, toujours en vertu de ce principe de l’abrogation (contenu dans le Coran, je le rappelle), les versets qui prêchent l’indulgence, la tolérance, sont abrogés par ceux qui prônent la violence et l’intolérance. Ceux qui invoquent les versets de la période mecquoise pour soutenir que « l’islam est une religion de paix etc. » sont ignorants du principe de l’abrogation, ou pire encore, le connaissent très bien mais mentent par omission afin de vous manipuler.

Anne-Marie Delcambre fournit dans son dernier livre, au chapitre « Sourates du Coran ? », une liste fort précieuse des sourates de La Mecque et de Médine. Sur un total de 114 sourates, 86 sont mecquoises, 28 sont médinoises.

Sont médinoises les sourates suivantes (dans l’ordre de la révélation) : 2, 8, 3, 33, 60, 4, 99, 57, 47, 55, 13, 76, 65, 98, 59, 24, 22, 63, 58, 49, 66, 64, 61, 62, 48, 5, 9, 110. La sourate 2 est ainsi la première sourate de la période médinoise, et les sourates 5, 9 et 110 en sont les dernières.

Arrêtons-nous un instant sur deux sourates médinoises particulièrement importantes.

« La sourate 9, sourate médinoise, l’avant-dernière révélée, est d’une importance primordiale. Le verset 29 de cette sourate 9, révélée en 631, abroge toute disposition antérieure autorisant une attitude plus douce envers les polythéistes, les juifs, les chrétiens, les sabéens et les zoroastriens. Ce verset n’établit plus de différence entre les idolâtres et les monothéistes. » [4]

Or, que dit cette sourate 9, verset 29 ?« Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être humiliés».(C’est le statut de la dhimmitude qui fait du non musulman un être inférieure. Alors qui est raciste? l’Islam bien sûr et c’est dit clairement dans le Coran. Ndlr Gérard Brazon)

Le verset 4 (ou 4-5) de la sourate 47 (95ème révélée) est appelé « verset du jihad » : il abroge tous les versets appelant à la paix. Et que dit le « verset du jihad » ?

« Lorsque vous rencontrez (au combat) ceux qui ont mécru frappez-en les cous. Puis, quand vous les avez dominés, enchaînez-les solidement. Ensuite, c’est soit la libération gratuite, soit la rançon, jusqu’à ce que la guerre dépose ses fardeaux. Il en est ainsi, car si Allah voulait, Il se vengerait Lui-même contre eux, mais c’est pour vous éprouver les uns par les autres. Et ceux qui seront tués dans le chemin d’Allah, Il ne rendra jamais vaines leurs actions ». (notons que le bien pensant parle souvent du jihad comme d’une bataille contre soi pour mieux s’élever vers dieu. cette sourate prouve qu’il existe aussi un jihad de violence, de contrainte et de guerre sainte. ndlr Gérard Brazon)

Il faut donc avoir cette règle de l’abrogation à l’esprit lors de toute discussion au sujet de l’islam, que ce soit avec des gens qui l’ignorent et à qui il faut alors l’expliquer, ou avec des gens qui la connaissent mais comptent sur notre ignorance pour avancer leurs pions et nous induire en erreur…

Un cas d’école à connaitre absolument. Il est utilisé par les propagandistes musulmans pour nous faire croire que l’islam est tolérant, c’est le célèbre verset 256 (ou 257) de la sourate 2 qui dit: «Nulle contrainte en religion .» Il est censé nous laisser croire que l’on peut entrer ou sortir de l’islam librement. Certes c’est un verset médinois mais il est abrogé par un autre verset médinois ultérieur, le non moins célèbre verset de la dhimmitude, le verset 29 de la sourate 9, vu précédemment, mais que je cite à nouveau :« Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être humiliés ».

Tant que cette règle de l’abrogation ne sera pas abrogée, si j’ose dire, les tentatives de ceux qui conseillent de ne tenir compte que des sourates mecquoises n’ont hélas aucune chance d’aboutir.

Le Soudanais Mahmoud Muhammad Taha (1908-1985), pour l’avoir proposé, le paya de sa vie : il fut déclaré coupable d’apostasie et fut pendu le 20 janvier 1985. Il avait soixante-seize ans.

[1] Anne-Marie Delcambre, Soufi ou mufti ? Quel avenir pour l’islam ? Desclée de Brouwer, 2007

[2] Il existe deux numérotations des versets : moderne (à partir de 1923) et ancienne (avant 1923, donnée ici entre parenthèses si décalage). Pour consulter le coran, en numérotation moderne, traduit en français par Muhammad Hamidullah, savant vénéré par les musulmans francophones : http://oumma.com/coran

[3] Anne-Marie Delcambre, op. cit. , p. 52

[4] Anne-Marie Delcambre, op. cit. , p. 27

Source

La Trinité dans la bible, Jésus est-il Dieu?

La Trinité dans l’ancien testament – Deux personnes révélées dans le premier verset

Genèse 1, 1 Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. La terre était informe et vide; les ténèbres couvraient l’abîme, et l’Esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux.

Dieu étant Esprit, l’Esprit de Dieu est l’Esprit de l’Esprit (Dieu)

Genèse 1, 26  Puis Dieu dit:  » Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les animaux domestiques et sur toute la terre, et sur les reptiles qui rampent sur la terre. « 

Dieu parle à au moins une autre personne quand Il dit : Faisons l’homme…

L’Esprit-Saint

Actes des Apôtres 2, 1 Comme le jour de la Pentecôte était arrivé, ils étaient tous ensemble au même (lieu). Tout à coup, il vint du ciel un bruit comme celui d’un violent coup de vent, qui remplit toute la maison où ils étaient assis. Et ils virent paraître des langues séparées, comme de feu; et il s’en posa (une) sur chacun d’eux. Et tous furent remplis d’Esprit-Saint, et ils se mirent à parler en d’autres langues, selon ce que l’Esprit leur donnait de proférer.

L’apôtre Jean reconnait Jésus comme Dieu et rapporte le témoignage de Jean-Le-Baptiste (le précurseur)

Jean 1: 1  Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était au commencement en Dieu. Tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes, Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue. Il y eut un homme, envoyé de Dieu; son nom était Jean. Celui-ci vint en témoignage, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui: non que celui-ci fût la lumière, mais il avait à rendre témoignage à la lumière. La lumière, la vraie, celle qui éclaire tout homme, venait dans le monde. Il (le Verbe) était dans le monde, et le monde par lui a été fait, et le monde ne l’a pas connu. Il vint chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais quant à tous ceux qui l’ont reçu, Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, Qui non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu sont nés. Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous, (et nous avons vu sa gloire, gloire comme celle qu’un fils unique tient de son Père) tout plein de grâce et de vérité.

Jésus parlant de la trinité

Mathieu 28, 16  Les onze disciples s’en allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait désignée. En le voyant, ils se prosternèrent; mais il y en eut qui doutèrent. Et Jésus s’approchant leur parla ainsi:  » Toutes puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous toujours jusqu’à la fin du monde. « 

Jean-Baptiste parlant de Jésus qui baptisera par l’Esprit-Saint

Matthieu 3:11  » Moi, je vous baptise dans l’eau pour le repentir; mais celui qui vient après moi est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter ses sandales; lui, il vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu. Dans sa main est le van: il nettoiera son aire, il amassera son froment dans le grenier, et il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point. « 

Nom de Dieu dans l’ancien testament

Exode 3,14 Moïse dit à Dieu: « Voici, j’irai vers les enfants d’Israël, et je leur dirai: Le Dieu de vos pères m’envoie vers vous. S’ils me demandent quel est son nom, que leur répondrai-je? » Et Dieu dit à Moïse: « Je suis celui qui suis » Et il ajouta: « C’est ainsi, que tu répondras aux enfants d’Israël: Celui qui est m’envoie vers vous. »

Exode 6,3  Je suis apparu à Abraham, à Isaac et à Jacob comme Dieu tout-puissant mais sous mon nom de Yahweh, je ne me suis pas fait connaître à eux.

Jésus se déclarant Dieu

Jean 8:57  Les Juifs lui dirent: « Vous n’avez pas encore cinquante ans, et vous avez vu Abraham? » Jésus leur répondit: « En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham fut, je suis. » Alors ils prirent des pierres pour les lui jeter; mais Jésus se cacha, et sortit du temple.

Jean 10: 22 On célébrait à Jérusalem la fête de la Dédicace; c’était l’hiver; Et Jésus se promenait dans le temple, sous le portique de Salomon. Les Juifs l’entourèrent donc et lui dirent: « Jusques à quand tiendrez-vous notre esprit en suspens? Si vous êtes le Christ dites-le nous franchement. » Jésus leur répondit: « Je vous l’ai dit, et vous ne me croyez pas: les œuvres que je fais au nom de mon Père rendent témoignage de moi; Mais vous ne me croyez point, parce que vous n’êtes pas de mes brebis. Mes brebis entendent ma voix. Je les connais et elles me suivent. Et je leur donne une vie éternelle, et elles ne périront jamais, et nul ne les ravira de ma main. Mon Père qui me les a données, est plus grand que tous, et nul ne peut les ravir de la main de mon Père. Mon père et moi nous sommes un. » Les Juifs ramassèrent de nouveau des pierres pour le lapider. Jésus leur dit: « J’ai fait devant vous beaucoup d’œuvres bonnes qui venaient de mon Père: pour laquelle de ces œuvres me lapidez-vous? » Les Juifs lui répondirent: « Ce n’est pas pour une bonne œuvre que nous vous lapidons, mais pour un blasphème, et parce que, étant homme, vous vous faites Dieu; Jésus leur répondit: « N’est-il pas écrit dans votre Loi: J’ai dit: vous êtes des dieux? Si la Loi appelle dieux ceux à qui la parole de Dieu a été adressée, et si l’Écriture ne peut être anéantie, comment dites-vous à celui que le Père a sanctifié et envoyé dans le monde: Vous blasphémez, parce que j’ai dit: Je suis le Fils de Dieu? Si je ne fais pas les œuvres de mon Père, ne me croyez pas. Mais si je les fais, alors même que vous ne voudriez pas me croire, croyez à mes œuvres: afin que vous sachiez et reconnaissiez que le Père est en moi, et que je suis dans le Père. »

Prières de Sainte Catherine de Sienne XIII, XIV, XV

XIII – Prière faite à Rome.

1. O Dieu d’amour, que puis-je dire de votre Vérité? Parlez de la vérité, vous qui êtes la Vérité. Moi je vous ignore, et je ne puis parler que des ténèbres. Je n’ai pas suivi le Fruit de votre croix, et j’ai marché dans les ténèbres sans les connaître; car celui qui connaît les ténèbres connaît la lumière. Mais moi j’ai suivi les ténèbres, et je ne les ai pas approfondies. Dites-moi, Seigneur, la vérité sur votre croix, et j’écouterai. Vous me dites qu’il y en a qui persécutent le Fruit de votre croix, et c’est vous qui êtes le Fruit de votre croix. O Verbe! Fils unique de Dieu, qui, par l’excès de votre amour pour nous, vous êtes placé comme un fruit sur deux arbres: sur l’arbre de la nature humaine d’abord, pour nous révéler la vérité de votre Père invisible, que vous représentez; sur l’arbre de la Croix ensuite, où ce ne sont pas les clous qui vous ont attaché, mais les seules forces de votre amour, et cela pour nous montrer la vérité de la volonté de votre Père qui voulait notre salut.

2. C’est de cet arbre qu’a coulé le Sang précieux qui, par l’union de la nature divine, nous a donné la vie, et qui, par sa vertu, nous purifie encore du péché dans les sacrements. Vous avez déposé ce Sang dans les celliers de l’Église militante, et vous en avez donné les clefs et la garde à votre Vicaire sur terre. Les hommes ne le savent et ne le comprennent que par la lumière dont vous éclairez leur intelligence, la partie la plus noble de notre âme. Et cette lumière est la lumière de la foi, que vous accordez à tout chrétien dans le baptême, où votre grâce coule pour effacer la tache originelle et nous donner la lumière suffisante pour nous conduire à la béatitude.

3. Nous pouvons, par la corruption de l’amour-propre, obscurcir nos yeux, que votre grâce a illuminés clans le baptême. Nous pouvons nous aveugler par les nuages de la tiédeur et les vapeurs de l’amour-propre; et alors nous vous méconnaissons, vous et le véritable bien. Nous appelons mal ce qui est bien, et bien ce qui est mai, et nous devenons, par cet abus de la vérité, plus ingrats et plus mauvais que si nous n’avions pas reçu la lumière; car un chrétien qui s’égare est pire qu’un infidèle; il peut seulement recourir plus facilement au remède qui doit le guérir, à cause des lueurs de la foi qui reste encore en lui.

4. Oui, Seigneur, ceux-là sont les ennemis de votre Croix et de votre Sang; car ils ne vous suivent pas dans votre Passion; ils vous persécutent, ils attaquent votre Vicaire, qui a les clefs du cellier où se conservent votre Sang et le sang des martyrs, qui n’a de vertu que par le vôtre. Leur rébellion et leurs péchés viennent de ce qu’il ont perdu la lumière de la Vérités qu’on acquiert par la foi (Sainte Catherine parle ici de la rectitude de jugement que donne la foi.). Aussi les philosophes qui connaissaient les créatures, mais qui n’avaient pas la foi, n’ont-ils pu se sauver.

XIV – Prière faite à Rome.

1. O Dieu éternel, délivrez-moi des chaînes de mon corps, afin que je puisse voir votre Vérité; car maintenant la mémoire ne peut vous saisir, l’intelligence vous comprendre, et la volonté vous aimer comme vous le méritez. O Nature divine, qui ressuscitez les morts, et qui seule donnez la vie, comment vous êtes-vous unie à notre nature mortelle, pour lui rendre la vie? O Verbe éternel! cette union était si parfaite, que rien n’a pu la rompre. Sur la Croix, la nature mortelle souffrait, mais la nature divine vivifiait, et vous étiez à la fois dans la béatitude et la douleur: le tombeau même n’a pu séparer vos deux natures.

2. O Père éternel! vous avez revêtu votre Verbe de notre nature, afin qu’en elle il satisfit pour nous; vous avez voulu punir le Fils véritable pour la faute du fils adoptif. O Père éternel! que vos jugements sont profonds et ineffables! L’homme insensé peut-il les comprendre? Il juge d’après les apparences vos œuvres et celles de vos serviteurs, au lieu de les juger d’après la charité que vous répandez dans les âmes.

3. Homme ignorant et grossier, puisque Dieu t’a fait homme pourquoi te faire animal et abaisser ton jugement au dessous de celui de la brute? Tu sais que ceux qui sont ainsi tombent dans les peines éternelles de l’enfer; et là, l’homme est anéanti, non pas quant à la nature, mais quant à la grâce qui perfectionne la nature, et sans laquelle tout n’est rien.

XV – Prière faite à Rome, le 12 août, jour de l’octave de saint Dominique.

1. O ingratitude de l’homme! ô amour incompréhensible et infini de Dieu! Vous dites, Père éternel, que l’homme qui se regarde vous trouve en lui-même, parce qu’il a été fait à votre image; il a la mémoire pour vous retenir, vous et vos bienfaits, et il participe à votre puissance; il a l’intelligence pour vous connaître, et il participe à votre Sagesse, qui est votre Fils unique, notre Sauveur Jésus-Christ; il a la volonté pour vous aimer, et il participe à la clémence du Saint Esprit. Ainsi, non seulement vous l’avez créé à votre ressemblance, mais vous avez pour ainsi dire en vous sa ressemblance, puisque vous êtes en lui et qu’il est en vous.

2. Je ne me suis pas connue en vous, mon Dieu; je ne vous ai pas connu en moi, et c’est là le malheur des pauvres ignorants qui vous offensent. Sans leur ignorance, pourraient-ils ne pas vous aimer? Cette ignorance est causée par la privation de la lumière de la grâce, et cette privation vient elle-même des nuages que produit l’amour sensitif. La conformité entre les hommes est si grande, que quand ils ne s’aiment pas ils s’éloignent de leur propre nature.

À la fin de cette prière, on lit dans la version latine: « Sainte Catherine pria ensuite pour les siens, afin qu’ils participassent à la nature divine, en s’aimant les uns les autres, car c’est la vraie ressemblance. Et elle ajouta: Mon Dieu, je ne puis avoir une plus grande grâce que de passer ma vie dans les peines, et de la terminer pour vous par le martyre »

Prières de Sainte Catherine de Sienne X, XI, XII

X – Prière faite à Rome, le mercredi 3 mars 1379.

1. O Trinité éternelle, Dieu tout puissant, nous sommes des arbres de mort, et vous êtes l’arbre de vie. Dieu infini, quel spectacle de voir dans votre lumière l’arbre de votre créature! Vous aviez tiré de vous, Pureté suprême, son âme pure et innocente, et vous l’avez unie à un corps formé du limon de la terre. Vous aviez donné à cette arbre pour rameaux les puissances de l’âme, qui sont l’intelligence, la mémoire et la volonté. Et quels fruits devaient porter ces rameaux? La mémoire devait retenir, l’intelligence devait comprendre, la volonté devait aimer. O arbre, dans quel heureux état le jardinier divin t’avait planté!

2. Hélas! cet arbre, ô mon Dieu, s’ est séparé de l’innocence par sa faute; il est tombé, Il est devenu d’un arbre de vie un arbre mort; et il ne pouvait plus porter que des fruits empoisonnés. Mais, éternelle Trinité, vous vous êtes passionnée jusqu’à la folie pour votre créature; et lorsque vous avez vu que cet arbre ne devait plus produire que des fruits de mort, parce qu’il s’était séparé de vous, qu êtes la Vie, vous l’avez sauvé par ce même amour qui vous avait poussé à le créer; vous avez greffé votre divinité sur l’arbre perdu de notre humanité. Bonne et bienfaisante greffe, vous avez mêlé votre douceur à notre amertume, la splendeur aux ténèbres, la sagesse à la folie, la vie à la mort, l’infini au fini.

3. Après l’injure que votre créature vous avait faite, qui donc vous a pu forcer à cette union qui nous rend la vie? C’est l’amour, le seul amour; et cette greffe merveilleuse a vaincu la mort. Mais cela ne suffisait pas aux ardeurs de votre charité, ô Verbe éternel: vous avez voulu arroser cet arbre de votre propre Sang, et ce Sang par sa chaleur fait fructifier l’arbre, dès que l’homme consent à s’unir et à vivre en vous. Son cœur et ses affections doivent être liés à la greffe céleste par les liens de la charité et l’imitation de votre doctrine. Nous ne pouvons et ne devons pas suivre le Père, en qui ne peut être la peine; nous devons par la peine et le tourment de nos désirs nous rendre conformes à vous; car vous êtes la vie, et rions produirons des fruits de vie en recevant votre sève vivifiante. Dès que nous vous sommes unis, les rameaux donnent leurs fruits; la mémoire se remplit du souvenir continuel de vos bienfaits; l’intelligence vous contemple pour connaître votre éternelle volonté et vos perfections; la volonté veut aimer ce que l’intelligence lui a fait connaître. Chaque rameau donne ses fruits aux autres rameaux; et parce que l’âme, par la connaissance qu’elle a de vous, se connaît mieux elle-même, elle se hait dans sa sensualité.

4. O Amour infini, quelles merveilles vous avez opérées dans les créatures raisonnables! O Dieu éternel, si, lorsque l’homme était un arbre de mort, vous avez daigné en faire un arbre de vie, en vous y greffant vous-même, ne pourriez-vous pas, malgré la multitude de ceux qui, par leur faute, portent des fruits de mort, en ne s’unissant point à vous qui êtes la vie, ne pourriez-vous pas sauver le monde que je vois se séparer de vous et persévérer dans la mort! Oui, les hommes ne viennent pas à la fontaine où est le Sang qui doit arroser leur arbre; la vie éternelle coule pour nous, pauvre créatures, qui l’ignorons et n’en profitons pas.

5. O mon âme aveugle et misérable, où sont les cris et les prières que tu dois répandre en la présence de ton Dieu, qui t’y invite sans cesse? Où est ta douleur profonde pour ces arbres qui restent dans la mort? Où sont ces désirs suppliants qui fléchissent l’éternelle Bonté? Hélas! je ne les ai pas, parce que je n’ai pas encore perdu l’amour de moi-même. Si je l’avais perdu, si je cherchais Dieu, si je voulais uniquement la gloire de son nom, mon cœur s’échapperait de mon corps et mes os distilleraient leur moelle. Mais je n’ai jamais produit que des fruits de mort, parce que je ne suis pas greffé sur vous, mon Dieu.

6. Quelle lumière, quel éclat reçoit l’âme qui est greffée véritablement sur vous! O générosité sans borne, la mémoire nous dit sans cesse que nous sommes obligés d’aimer et de suivre la doctrine et les exemples du Verbe, votre Fils unique. Sans la lumière de la foi, nous ne pourrions suivre cette doctrine et ces exemples; aussi l’intelligence fixe cette lumière pour en avoir la connaissance, la volonté aime aussitôt ce que l’intelligence lui montre; tous les rameaux se communiquent leur fécondité.

7. O arbre, où prends-tu donc tes fruits de vie, puisque tu es mort et stérile? C’est l’Arbre de vie qui te les donne; s’il n’était pas greffé sur toi, tu n’aurais aucune vertu, puisque tu n’es rien. O Vérité éternelle, vous nous produisez des fruits d’amour et de lumière, des fruits de cette prompte obéissance qui vous a fait courir avec ardeur à la mort ignominieuse de la Croix. Vous avez porté des fruits en greffant votre divinité sur notre humanité, en attachant votre corps sacré sur le gibet du Calvaire. L’âme qui vous est unie ne pense qu’à votre honneur et au salut des âmes. Elle devient sage, fidèle, patiente et prudente.

8. Rougis de honte, toi qui par tes fautes te prives de si grands biens et t’exposes à de si grands malheurs. Tes bonnes œuvres ne peuvent servir à Dieu, et tes offenses ne peuvent lui nuire; mais son infinie bonté se réjouit lorsque sa créature veut bien recevoir ses dons ineffables et accepter le bonheur qui lui est destiné. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi. Unissez-vous, greffez sur vous ceux que vous m’avez donnés à aimer d’une manière spéciale, afin qu’ils portent des fruits de vie. O bonté infinie! la rosée de votre lumière céleste donne à l’âme qui vous est unie la paix de la conscience; et la rosée de vos serviteurs dissipe les nuages et rend la lumière et la paix à l’Église votre Épouse; faites tomber ces rosées, je vous en conjure humblement. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi. Ainsi soit-il.

XI – Prière faite à Rome, le jour de l’Annonciation de la Sainte Vierge, 1379.

1. O Marie! Marie, temple de la Trinité, Marie, foyer du feu divin, Marie, Mère de la miséricorde, vous avez porté je fruit de vie; vous avez sauvé le genre humain, puisque c’est avec votre chair que le Christ nous a rachetés. Oui, le Christ nous a rachetés par sa Passion, et vous, par les douleurs de votre âme et de votre corps (La sainte Vierge contribua réellement à notre rédemption par sa maternité divine et par ses souffrances au Calvaire. Elle pouvait bien dire comme saint Paul: Gaudeo in passionibus pro vobis, et adimpleo ea quae desunt passionum Christi in carne mea pro corpore ejus, quod est Ecclesia (Coloss. I, 24).). O Marie, océan tranquille, Marie, source de la paix! Marie, vous êtes l’arbre nouveau qui nous a donné cette fleur odorante, ce Verbe, ce Fils unique de Dieu, qui vous a choisie comme une terre fertile. Vous êtes la terre et vous êtes l’arbre.

2. O Marie, char de feu, vous avez conservé et caché le feu dans la cendre de notre humanité. Marie, vase d’humilité, où brillait la lumière de la vraie science qui vous a élevée au dessus de vous-même, vous avez charmé le Père céleste, et il vous a ravie; il vous a captivée dans les liens d’un amour ineffable, et par cette lumière, cette ardeur de votre charité, cette flamme de votre humilité, vous l’avez vaincu vous-même, et vous avez forcé sa divinité à descendre en vous. Sa bonté infinie pour les hommes était d’ailleurs votre complice.

3. O Marie, grâce à la lumière que vous aviez, vous n’avez pas été une-vierge folle, mais une vierge prudente; car vous avez demandé à l’ange Comment ce qu’il vous annonçait pourrait se faire. Vous n’ignoriez pas que tout était possible à la toute-puissance de Dieu, et vous n’aviez aucun doute à cet égard. Pourquoi disiez-vous: « Je ne connais pas d’homme »? (Luc, 1, 34). Ce n’était pas le manque de foi, mais votre humilité profonde qui vous le faisait dire; vous croyiez à la puissance de Dieu, mais vous ne pensiez qu’à votre indignité.

4. Marie, vous avez été troublée par les paroles de l’ange; il me semble, dans la lumière de Dieu, que ce n’était pas de crainte, mais d’admiration. Et qu’admiriez-vous? Vous admiriez l’immensité de la bonté de Dieu, et vous étiez troublée en voyant combien vous étiez indigne de la grâce qu’il voulait vous faire. Cette comparaison de votre indignité et de votre faiblesse avec le miracle ineffable de la grâce divine, vous remplissait de confusion. Votre demande prouvait votre humilité profonde; vous étiez, non pas effrayée, mais étonnée de l’immensité de la bonté de Dieu, que vous compariez à votre petitesse et au néant de votre vertu.

5. Aujourd’hui, ô Marie, vous êtes le livre où notre règle est écrite. Car en vous brille la sagesse du Père céleste, en vous paraît la dignité, la force, la liberté de l’homme. Oui, j’y vois la dignité de l’homme; car, lorsque je vous contemple, ô Marie, je vois que le Saint Esprit a représenté en vous la sainte Trinité en y formant le Verbe incarné, le Fils unique de Dieu. Il y a montré la Sagesse éternelle, qui est le Verbe; la puissance du Père, qui a pu faire une si grande chose; et la clémence du Saint-Esprit, par la grâce et la charité duquel s’est accompli cet ineffable mystère.

6. Si je médite sur cet acte de vos conseils, ô éternelle Trinité, je découvre que vous avez pris en considération la noblesse et la dignité du genre humain. L’amour vous avait forcé à le créer, l’amour vous a forcé à le racheter et à le sauver. Vous aviez bien prouvé que vous aimiez l’homme avant qu’il fût, puisque vous avez voulu le tirer de vous par amour; mais vous avez prouvé bien davantage cet amour, lorsque vous vous êtes donné à lui, en vous revêtant des haillons de son humanité. Pouviez-vous donner plus que vous-même, et n’avez-vous pas le droit de lui dire: Que te devais-je? et ce que je pouvais, ne l’ai-je pas fait? Oui, tout ce que, dans vos conseils, la Sagesse éternelle avait jugé nécessaire pour sauver le genre humain, votre clémence ineffable l’a voulu, et votre puissance l’a accompli, au jour de l’Annonciation.

7. Votre infinie miséricorde voulait le salut de votre créature, ô éternelle Trinité! et vous désiriez lui donner le bonheur parfait qui lui était destiné, puisque vous l’aviez créée pour qu’elle fût unie à vous, et qu’elle en jouît pleinement; mais votre justice s’y opposait, en vous disant que, si vous étiez miséricordieux, vous étiez juste aussi, et que votre justice ne devait pas changer. La justice ne laisse jamais le mal sans châtiment et le bien sans récompense. L’homme ne pouvait être sauvé s’il ne satisfaisait pas à la justice pour sa faute.

8. Alors, qu’avez-vous fait? Qu’avez-vous décidé? Comment votre sagesse éternelle et incompréhensible est-elle restée dans la vérité, en faisant à la fois miséricorde et justice? Quel moyen avez-vous pris pour nous sauver? Ce moyen a été de nous donner le Verbe, votre Fils unique. Il a revêtu notre humanité qui vous avait offensé, afin qu’en souffrant dans notre chair il peut satisfaire à votre justice, non pas par la vertu de l’humanité mais par celle de la Divinité unie à l’humanité. L’homme qui avait péché, s’acquitta envers la justice, parce que la miséricorde lui prêta, pour payer sa dette, la divinité du Verbe.

9. O Marie, le Verbe qui s’est incarné eu vous, est resté cependant uni à son Père, comme la parole intérieure de l’homme, lorsqu’elle s’exprime et qu’elle se communique, ne se sépare pas du cœur. N’est-ce point une preuve de la dignité de l’homme, pour qui Dieu a fait de si grandes et de si nombreuses merveilles?

10. Nous voyons encore aujourd’hui en vous, ô Marie, la force et la liberté de l’homme; car c’est après la délibération de l’auguste Trinité qu’un ange vous est envoyé pour vous annoncer le mystère des conseils divins, et pour vous demander votre consentement. Avant de descendre en votre sein, le Fils de Dieu s’adresse à votre liberté; il attend à la porte de votre volonté, il vous soumet le désir qu’il a d’habiter en vous, et il n’y serait jamais entré, si vous ne lui aviez dit: « Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole » (Luc, I, 38). N’est-ce pas là une grande preuve de la force et de la liberté de la volonté? Rien de bien ou de mal ne peut se faire sans elle. Le démon ni aucune créature ne la forcent au mal, si elle ne devient pas leur complice; et personne ne peut la contraindre au bien, si elle veut résister. La volonté de l’homme est donc libre.

11. O Marie, le Dieu tout puissant frappait à votre porte, et si vous ne lui aviez pas ouvert votre volonté, il n’eût pas pris la nature humaine. O mon âme, sois remplie de confusion, en voyant que Dieu fait avec toi un pacte et une alliance en Marie. Tu dois maintenant comprendre que celui qui t’a faite sans toi, ne peut pas sans toi te sauver, puisqu’il s’adresse à la volonté de Marie et qu’il attend son consentement. O Marie, amour délicieux de mon âme! en vous est écrit le Verbe qui nous donne la doctrine de vie; vous êtes le tableau qui nous le représente et qui nous l’explique.

12. Dès que la Sagesse, le Fils unique de Dieu, a été dans votre sein, il y a trouvé la croix du désir; et toute son ambition a été de mourir pour le genre humain, qu’il voulait sauver en prenant notre nature. C’était une grande croix que cette ambition qu’il voulait satisfaire.

13. O Marie, j’ai recours à vous et je vous offre mes prières pour l’Épouse de notre doux Sauveur, votre Fils bien-aimé; je vous implore pour son Vicaire, afin qu’il reçoive la lumière qui lui est utile pour discerner les meilleurs moyens de réformer l’Église. Unissez-lui les fidèles; rendez leur cœur semblable au sien, et qu’ils ne se révoltent jamais contre leur chef. Il est, mon Dieu, comme une enclume; ses nombreux ennemis l’attaquent par leurs paroles et lui nuisent tant qu’ils peuvent.

14. Je vous prie aussi pour ceux que vous m’avez donnés; enflammez-les, qu’ils soient des charbons ardents que consument votre amour et celui du prochain. Qu’ils aient, aux jours de l’épreuve, leurs barques bien fournies et bien disposées, pour eux et pour les autres. Je vous prie pour ceux que vous m’avez donnés: au lieu de les édifier, je les ai toujours scandalisés, au lieu d’être pour eux un modèle de vertus, je ne leur ai donné que des exemples d’ignorance et de négligence. Mais je m’adresse hardiment à vous en ce jour de grâce, parce que je sais, ô Marie, que rien ne peut vous y être refusé. Aujourd’hui, ô Marie, votre terre u produit notre Sauveur. Hé-las! je vous ai offensé toute ma vie, ô mon amour; oui, j’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

15. O Marie, soyez bénie entre toutes les femmes, pendant tous les siècles, car vous nous avez donné aujourd’hui votre substance. La Divinité s’est tellement unie et incorporée par vous à notre humanité, que rien maintenant ne peut l’en séparer, pas même la mort et notre Ingratitude. Car, comme la Divinité est restée unie au corps dans le sépulcre, et à l’âme de Jésus-Christ dans les limbes, puis à son âme et à son corps après la Résurrection, notre alliance avec elle n’a jamais été rompue, et elle ne le sera jamais pendant toute l’éternité.

XII – Prière faite à Rome.

1. O Vérité! qui suis-je pour que vous me donniez la vérité? Je suis celle qui ne suis pas, et votre Vérité est celle qui agit, parle, et fait toute chose. Votre Vérité est celle qui donne la vérité, et c’est par votre Vérité que je dis la vérité. Votre Vérité éternelle se communique de différentes manières à toutes les créatures; mais elle ne s’épuise pas et ne change jamais. Vous, Dieu éternel, Fils de Dieu, vous êtes venu de Dieu pour accomplir la volonté de votre Père, et personne ne peut avoir la vérité sans vous. Si quelqu’un veut avoir votre vérité, il ne doit l’affaiblir par aucune erreur; il faut la posséder sans mélange, et c’est ainsi que les bienheureux en jouissent dans votre éternelle contemplation; car ils participent à la vision que vous avez de vous-même.

2. Vous êtes la lumière avec laquelle votre créature vous voit, et, pour elle comme pour vous, il n’y a que ce moyen de vous contempler. Dès que les saints vous voient, ils jouissent de la lumière qui vous fait connaître, et parce que vous êtes toujours la même lumière, le même moyen, le même objet, ils ont la vision que vous avez de vous-même (Sainte Catherine ne confond pas la vision béatifique avec la vision divine; elle les unit seulement comme saint Paul, lorsqu’il dit: Qui autem, adhaeret Domino, unus spiritua est (I Cor. VI,17). Saint Jean dit aussi Scimus quoniam cum apparuerit, similes ei erimus, qui videbimus eum sicuti est (I Ep. III, 2).). Ils l’ont seulement à des degrés différents, les uns plus, les autres moins, selon la différence de leur mérite.

3. Les âmes, pendant cette vie, lorsqu’elles sont en état de grâce, reçoivent votre vérité par la lumière de la foi, qui nous fait croire l’enseignement de l’Église; mais ces âmes, selon leur disposition, reçoivent plus ou moins parfaitement la vérité, qui ne varie pas et qui est la même pour tous. Ainsi les bienheureux jouissent de la même vision, mais plus ou moins parfaitement, selon leur élévation dans la gloire.

Aux Sources du Coran – par frère Bruno Bonnet-Eymard

Par sa traduction scientifique du Coran, frère Bruno établit d’une manière certaine que les sources du Coran sont bibliques, Ancien et Nouveau Testament. L’islam n’est donc pas une révélation divine comme voudraient nous le faire croire les Musulmans, mais un plagiat de la Bible agrémenté de légendes et d’histoires arabes.

Cette traduction scientifique, à elle seule destructrice du mythe des origines de l’islam, est désormais confirmée par les travaux et découvertes archéologiques des savants Joachim Gnilka et Christophe Luxenberg.

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Prières de Sainte Catherine de Sienne VII, VIII, IX

VII – Prière faite à Rome, le dimanche 20 février 1379.

1. Je le confesse, Dieu éternel, je le confesse, adorable Trinité, vous me voyez et vous me connaissez, votre lumière me l’a fait comprendre. Je sais que vous n’ignorez pas les besoins de votre Épouse bien-aimée, la bonne volonté de votre Vicaire, et les obstacles qu’il rencontre dans le bien qu’il veut faire. J’ai vu à vos clartés que tout vous est présent, parce que rien ne peut échapper à votre regard; j’ai vu aussi le remède que vous avez préparé en vous-même pour guérir la mort des hommes, vos enfants.

2. Ce remède est le Verbe, votre Fils unique, et vous avez trouvé moyen de nous l’appliquer toujours. Vous avez conservé les cicatrices de ce Fils bien-aimé, afin qu’elles puissent sans cesse solliciter pour nous votre miséricorde. Oui, j’ai vu dans votre lumière que l’ardeur de votre charité vous a fait conserver les cicatrices du corps de Jésus-Christ: ni sa résurrection, ni sa gloire ne peuvent en effacer la couleur sanglante. Vous avez vu en vous, qu’après le mal dont vous l’aviez délivré, l’homme devait tomber encore dans le péché par sa faute, et vous lui avez donné pour remède le sacrement de Pénitence, où le prêtre verse sur l’âme le sang de l’humble Agneau; et, comme vous avez vu en votre Verbe le principal moyen de nous réconcilier avec vous, vous avez vu aussi tous les autres moyens nécessaires à notre salut. J’ai compris dans votre lumière que vous avez vu toutes ces choses; c’est par cette lumière que je vois, et sans elle je marcherais dans les ténèbres.

3. O doux Amour, vous avez vu en vous les nécessités de notre mère la sainte Église; vous savez ce qui lui manque, et vous lui accordez le secours dont elle a besoin par les prières de vos serviteurs; vous voulez qu’ils soient des murs sur lesquels s’appuient les murs de la sainte Église: car la clémence du Saint Esprit les embrase du zèle de sa réforme. Vous connaissez la loi de notre nature corrompue, qui se révolte sans cesse contre votre volonté. Vous saviez que nous devions la suivre; car vous n’ignorez pas combien nous sommes faibles, impuissants, misérables: aussi votre admirable Providence a tout disposé pour que nous ayons tous les secours nécessaires. Vous nous avez donné le rocher inexpugnable de la volonté, afin de défendre la-faiblesse de notre chair; car la volonté est si forte, que ni le démon, ni les créatures ne peuvent la vaincre sans le consentement du libre arbitre qui en dispose.

4. D’où vient, ô Bonté éternelle, cette force de la volonté dans votre créature, si ce n’est de vous qui êtes la Force souveraine et infinie? Oui, nous participons à votre volonté, quand la nôtre en découle. La volonté de l’homme est invincible quand elle obéit à la vôtre; elle est impuissante quand elle s’en éloigne; il est dit que vous l’avez faite à votre ressemblance, et tant qu’elle la conserve, elle triomphe, O Père éternel, vous montrez dans notre volonté la force de la vôtre: car, s’il y a tant de puissance dans une chétive créature, combien ne doit-il pas y en avoir en vous, Créateur et Maître de toutes choses!

5. Cette volonté que vous avez confiée à notre libre arbitre, est encore fortifiée par la lumière de la foi; par cette lumière, l’homme connaît votre éternelle volonté, et il voit qu’elle n’a d’autre but que notre sanctification. Cette vue augmente et fortifie sa volonté, qui par la foi devient active et puissante; car une volonté bonne et une foi vive ne peuvent exister sans les œuvres. Votre lumière produit et augmente le feu dans l’âme, parce qu’elle ne peut ressentir le feu de votre charité, si la lumière ne lui montre votre amour pour nous. Votre lumière est l’aliment du feu dans nos âmes comme le bois est celui du feu sur la terre; elle augmente la charité, parce qu’elle montre la bonté divine, et cette charité se développe en elle, parce qu’elle désire connaître Dieu davantage, et que vous voulez toujours la satisfaire.

6. O Providence admirable, vous ne voulez pas que l’homme marche dans les ténèbres, et qu’il l’este dans la peine; vous lui avez donné la lumière de la foi, qui éclaire sa route, et lui procure la paix. Avec elle, I’âme ne peut mourir de faim, ni languir dans la nudité de la misère. Vous la nourrissez de votre grâce, vous lui faites savourer les douceurs de votre charité, vous la revêtez de la robe nuptiale de votre amour et des ornements de votre volonté sainte; vous lui prodiguez les trésors de votre éternité. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi; car les ténèbres de la loi mauvaise qui est en moi, -et que j’ai toujours suivie, ont obscurci le regard de mon intelligence. Je ne vous ai pas connu, vous qui êtes la véritable Lumière, et cependant il a plu à votre ardente charité de m’illuminer de ses clartés.

7. Oui, vous aviez prévu la faute que devait commettre l’homme, et vous avez préparé un remède à cette faute dans le Verbe, notre Rédempteur. Vous avez prévu notre faiblesse, et vous avez préparé un secours à cette faiblesse dans la force de la volonté, qui a son origine en vous; et ce qui la guide et la soutient, c’est la lumière sacrée de la foi; c’est cette lumière qui est le commencement, le milieu et la fin de toute perfection; c’est elle qui la conserve et l’augmente dans les âmes; c’est elle qui féconde la charité et lui fait produire des œuvres (Ce paragraphe ne se trouve pas dans la version latine).

8. O Dieu, Amour, Charité infinie! vous pénétrez votre créature; elle est en vous, et vous en elle, par la création, par la force de la volonté, par ce feu dont vous l’avez animée, par la lumière naturelle que vous lui avez donnée pour vous voir, ô véritable Lumière, pour s’exercer avec zèle à toutes les vertus, pour louer et glorifier votre saint nom. O Lumière au dessus de toute lumière! ô Bonté au dessus de toute bonté! ô Sagesse au dessus de toute sagesse, Feu au dessus de tout feu! vous êtes tout; car seul, vous êtes Celui qui est, et rien ne peut être s’il n’a reçu l’être de vous.

9. O mon âme, aveugle et misérable, n’es-tu pas indigne de former avec les serviteurs de Dieu un appui à la sainte Église? Ne mériterais-tu pas plutôt d’être dévorée par les bêtes dont tu accomplis toujours les actes? Je vous rends grâces, ô Dieu éternel, je vous rends grâces de vouloir bien m’utiliser ainsi malgré mes iniquités.

10. Je vous en conjure, inspirez aux cœurs de vos fidèles des désirs ardents qui les excitent à la réforme de votre Épouse; faites qu’ils prient sans cesse pour elle, afin que vous puissiez les exaucer. Conservez aussi et augmentez le bon vouloir de votre Vicaire, et accordez-lui de rendre sa vie parfaite.

11. Je vous prie aussi, et je vous implore pour toutes les créatures raisonnables, mais surtout pour ceux que vous m’avez confiés, et que je vous rends, à cause de mon insuffisance et de ma faiblesse. Je ne veux pas que mes péchés leur nuisent, car j’ai toujours suivi la pente mauvaise de la chair; je désire et je demande que vous les conduisiez à la perfection, afin qu’ils méritent d’être exaucés dans les prières qu’ils vous adressent et qu’ils doivent vous adresser pour le salut du monde et la réforme de votre Église. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi; pardonnez-moi ma misère et mon ingratitude, ô Dieu éternel. Je reconnais que votre bonté a bien voulu me conserver pour épouse, malgré mes infidélités continuelles et mes fautes sans nombre. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

VIII – Prière faite à Rome, le mardi 22 février de l’an 1379.

1. O Dieu éternel! Dieu éternel, je vous en conjure, ayez pitié de nous! Vous l’avez dit, auguste Trinité, la compassion qui fait naître la miséricorde vous est naturelle: accordez-nous donc cette miséricorde qui en est inséparable. Oui, je le reconnais, c’est votre compassion qui nous a donné votre Verbe pour rédempteur, et cette compassion avait sa source dans cet amour qui vous a fait créer votre créature. Parce que vous l’aimiez, vous avez voulu, après la perte de son innocence, la revêtir encore de votre grâce, et la rétablir dans son premier état. Vous ne lui avez pas ôté la liberté de vous offenser, mais vous lui avez laissé son libre arbitre, et cette loi mauvaise qui combat contre l’esprit et incline l’âme au mal.

2. Pourquoi, mon Dieu, lorsque vous lui êtes si bon, l’homme est-il si cruel pour lui-même? Quelle plus grande cruauté peut-il exercer contre lui que de se tuer par le péché? Il est bon envers ses sens; mais cette bonté est une barbarie contre son âme et même contre son corps, puisque le corps sera tourmenté avec l’âme dans l’enfer. Cette conduite vient de son aveuglement, qui l’empêche de connaître votre bonté pour nous. Montrez-lui donc que votre bonté ne lui servira de rien, s’il n’en a pas aussi pour lui-même; car vous avez créé l’homme sans l’homme, mais vous ne pouvez le sauver sans lui.

3. O Père tendre et miséricordieux! vous voulez que l’homme connaisse votre infinie bonté, afin qu’il apprenne à être bon pour lui-même, et ensuite pour son prochain; car, comme l’a dit le glorieux Apôtre, la charité doit commencer par nous-même. Que l’âme regarde votre bonté, afin qu’elle perde sa cruauté, et qu’elle prenne la nourriture qui la soutient et lui donne la vie. Dieu éternel, Abîme ardent de charité, votre regard veille sur nous; et pour que votre créature sache que votre miséricorde et votre justice observent les œuvres de chacun, vous lui avez donné l’œil de l’intelligence, qui voit que tout bien procède de la lumière, et que tout mal est causé par sa privation; car comment aimer ce qu’on ne voit pas, et comment voir sans la lumière?

4. O Dieu éternel, Père tendre et miséricordieux, ayez compassion de nous; nous sommes des aveugles car nous nous sommes privés de la lumière; moi, surtout, pauvre misérable, qui me nuis toujours à moi-même. Jetez ce regard de bonté qui a tout créé, sur les besoins du monde, et daignez le secourir. Vous nous avez donné l’être que nous n’avions pas, sauvez donc ce qui vous appartient. Vous avez répandu, quand il le fallait, la lumière de vos Apôtres sur le monde; nous en avons maintenant besoin plus que jamais; suscitez un autre Paul, dont les clartés illuminent toute la terre. Étendez votre miséricorde comme un voile qui nous cache aux regards de votre justice; ne jetez sur nous que ceux de votre bonté; enchaînez-nous avec les liens de votre charité, et qu’elle détruise tous les motifs de votre colère.

5. O douce et suave Lumière, ô Principe et Fondement de notre salut, puisque vous voyez nos besoins, faites-nous voir aussi votre éternelle bonté, pour la connaître et pour l’aimer. O union et rapport du Créateur avec la créature, et de la créature avec le Créateur, c’est votre charité qui nous attache à vous, c’est votre lumière qui est notre lumière. Oui, celui qui ouvre les yeux de son intelligence avec le désir de vous connaître, vous connaît. La lumière entre dans l’âme, dès que la volonté lui donne entrée; elle est toujours à la porte de l’âme, et dès qu’on lui ouvre, elle entre comme les rayons du soleil qui frappent à une fenêtre fermée pour pénétrer dans une maison et l’éclairer. Il faut que votre créature ait la volonté de vous connaître, afin qu’elle ouvre son intelligence, et que vous y répandiez vos splendeurs.

6. Quel miracle ne produisez-vous pas dans l’âme, ô bonne Lumière! Non seulement vous en chassez les ténèbres et vous y versez la clarté, mais vous détruisez par votre chaleur l’humidité de l’amour-propre, et vous entretenez l’ardeur vivifiante de la charité; vous rendez le cœur libre, parce que vous lui faites connaître la liberté que vous nous avez donnée, en nous arrachant à la servitude du démon, à laquelle nous étions si malheureusement livrés.

7. L’homme alors hait sa faiblesse à l’égard des sens; il devient dur pour eux et bon pour sa raison, en se rendant maître des puissances de son âme. Il ferme sa mémoire aux misères et aux vains plaisirs du monde; il se détache d’eux par l’oubli, et vos bienfaits deviennent l’unique objet de ses pensées. Il oblige sa volonté à v6us aimer par dessus toutes choses, et à aimer tout en vous.

8. Il ne veut plus suivre que vous, et alors il est bon pour lui-même, et comme il est bon pour lui, il est bon pour son prochain; il est prêt à donner sa vie pour le salut des âmes. Tout ce qu’il fait par charité, il le fait avec prudence, parce que vous lui montrez avec quelle prudence vous accomplissez tout en nous. Vous êtes la lumière qui rendez le cœur droit sans fausseté, large sans petitesse, tellement que toute créature raisonnable devient susceptible d’amour, et cherche le salut des autres selon les lois de la charité. Comme la lumière est inséparable de la prudence et de la sagesse, celui qu’elle éclaire expose bien son corps pour le salut du prochain, mais il n’y sacrifie jamais son âme; il n’est jamais permis à l’homme de commettre la faute la plus légère, cette faute devrait-elle sauver le monde; car pour l’utilité d’une créature finie, qui n’est rien par elle-même, on ne doit pas offenser le Créateur infini de toutes choses, qui est le souverain Bien.

9. Celui qui voit la lumière abandonnera s’il le faut sa fortune, pour sauver la vie de son prochain. Son cœur sera si ouvert, que tout le monde pourra y lire et le comprendre. Jamais son visage et sa langue ne déguiseront sa pensée; il se montrera dépouillé du vieil homme, et revêtu de votre volonté. O Père tout puissant, notre méchanceté vient de ce que nous ne voyons pas la bonté avec laquelle vous avez racheté nos âmes dans le sang précieux de votre Fils.

10. O Père miséricordieux, jetez un regard de bonté sur votre Église et sur votre Vicaire; abritez-le sous les ailes de votre miséricorde, afin que l’iniquité des superbes ne puisse lui nuire, et accordez-moi d’arroser de mon sang et d’engraisser de la mœlle de mes os le jardin de votre sainte Épouse. Si je regarde en vous, je vois que rien ne vous est caché. Les hommes du monde l’ignorent parce qu’ils sont ensevelis dans les ténèbres de l’amour-propre. S’ils le savaient, ils ne seraient pas si cruels pour leurs âmes, mais ils deviendraient bons à cause de votre bonté. Oh! je vous le demande de tout mon cœur, accordez la lumière nécessaire à toute créature raisonnable.

11. Oui, par le Verbe votre Fils, vous avez été à la fois bon et juste; son corps sacré a satisfait votre justice pendant que nos misères étaient l’objet de votre bonté. O Bonté suprême! comment n’attendrissez-vous pas notre dureté? comment mon cœur n’échappe-t-il pas de mes lèvres? Il faut qu’un nuage obscurcisse mon esprit, et que mon âme n’aperçoive pas votre ineffable tendresse. Quel père livrera pour un serviteur révolté son propre fils à la mort? Il n’y a que vous, ô mon Dieu! Vous avez revêtu votre Verbe de notre chair afin qu’il souffrit, et que nous puissions en recueillir le fruit si nous le voulons. Il faut maintenant que notre sensualité souffre, pour que notre âme reçoive le fruit de vie; c’est la loi et la vérité; car vous avez dit: « Je suis la Voie, la Vérité, et la Vie » (Jean, XIV, 6). Si nous voulons acquérir votre bonté, il faut marcher dans le chemin que vous avez volontairement suivi.

12. O Dieu éternel! je me plains moi-même à vous: punissez-moi d’être si cruelle pour mon âme et si faible pour mes sens. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi. O bienfaisante cruauté! qui brise et qui surmonte la sensualité pendant cette vie passagère, pour glorifier l’âme pendant l’éternité! D’où vient la patience, d’où viennent la foi, l’espérance et la charité, si ce n’est de cette bonté, qui enfante la miséricorde? Qui détache l’âme d’elle-même pour l’attacher à vous? c’est cette bonté qu’on obtient par votre lumière.

13. O Bonté ineffable! Bonté qui détruisez comme un baume délicieux la colère et la cruauté dans les âmes! je vous le demande encore, communiquez-vous à toutes les créatures raisonnables, et surtout à ceux que vous m’avez dit d’aimer d’un amour particulier. Rendez-les bons, afin qu’ils exercent cette cruauté parfaite qui détruit les vices de la volonté. Vous avez enseigné cette cruauté lorsque vous avez dit: « Celui qui vient à moi, et qui ne hait pas son père, sa mère, son épouse, ses enfants, ses frères et son âme, ne peut être mon disciple » (Luc, XIV, 20). Haïr son âme est difficile. Les serviteurs du monde haïssent souvent le reste sans agir par vertu;cela n’est pas difficile, mais il est plus pénible à l’homme de quitter sa nature que de la suivre. Notre nature est raisonnable;nous devons par conséquent obéir à la raison.

14. O vérité suprême! vous êtes un parfum au dessus de tous les parfums, une magnificence au dessus de toutes les magnificences, une bonté au dessus de toutes les bontés, vous êtes une justice qui surpasse toutes les justices; vous êtes la source même de la justice, qui rend à chacun selon ses œuvres. C’est par justice que vous permettez que le méchant se nuise à lui-même, en désirant des choses aussi viles que les richesses et les plaisirs du monde; car tout ce que vous avez créé est au dessous de l’homme. Vous l’avez fait pour qu’il en soit le maître, et non l’esclave. Vous seul êtes plus grand que nous, et c’est vous seul que nous devons toujours chercher, toujours servir. Aussi votre justice veut que l’homme de bien trouve en cette vie même la paix et le repos de son âme, parce qu’il met son affection en vous, qui êtes la paix véritable et le repos suprême. Ceux qui fournissent ainsi courageusement la carrière recevront de votre miséricorde la vie éternelle.

15. Vous êtes la Bonté infinie; personne ne vous contemple et ne vous comprend plus que vous ne le permettez; et vous le permettez autant que nous dilatons nos âmes pour vous recevoir. O très doux Amour! jamais je ne vous ai bien connu, et par conséquent jamais je ne vous ai bien aimé. Je vous recommande avec instance ceux dont vous m’avez chargée: vous me les avez confiés pour que je les réveille, et je dors toujours. Réveillez-les vous-même, ô Père tendre et secourable, afin que le regard de leur intelligence soit toujours fixé sur vous. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi! Mon Dieu, venez à mon aide! Seigneur, hâtez-vous de me secourir! Ainsi soit-il.

IX – Prière faite à Rome, le 1er mars 1379.

1. O puissante et éternelle Trinité, Trinité éternelle, Trinité éternelle, c’est vous qui nous avez donné le doux, l’aimable Verbe! O doux, ô aimable Verbe! autant notre nature est faible et portée au mal, autant la vôtre est forte et propre au bien! L’homme est faible parce qu’il a reçu une nature faible de son père; car le père ne peut donner à son fils une autre nature que celle qu’il a en lui-même. Nous sommes enclins au mal, parce que nous recevons avec la vie une chair révoltée. Notre nature est fragile et vicieuse, parce que nous sortons tous d’Adam comme d’une même souche. Notre premier père est devenu faible, parce qu’il s’est séparé de votre force infinie, ô Père éternel; il s’est révolté contre vous, et il a trouvé la révolte en lui; il a quitté le principe de la puissance et de la bonté, il est tombé dans la défaillance et les mauvais penchants.

2. O Verbe, Fils de Dieu, votre nature est forte et propre au bien; car vous l’avez reçue de votre Père tout puissant. Il vous a donné sa nature divine, où rien n’est imparfait, où le mal n’a jamais été et ne peut jamais être. Aussi, aimable Verbe, vous avez soutenu notre faiblesse en vous unissant à nous. Par cette union, vous avez fortifié notre nature; par la vertu de votre Sang, vous en avez guéri l’infirmité dans le saint baptême. Et lorsque nous sommes arrivés à l’âge de raison, nous avons été affermis par votre doctrine; car l’homme qui la suit dans la vérité en s’en revêtant parfaitement, devient si fort et si porté au bien, qu’il sent à peine la révolte de la chair contre l’esprit.

3. Son âme est intimement unie à votre doctrine et son corps, soumis à son âme, en veut suivre tous les mouvements. Ce qui le charmait autrefois dans les joies coupables du monde lui fait maintenant horreur, et les vertus qui lui semblaient si pénibles à pratiquer deviennent ses plus chères délices il est donc bien vrai, ô Verbe éternel, que vous corrigez la faiblesse de notre nature par la force de la nature divine que vous avez reçue de votre Père, et cette force vous nous l’avez donnée par le Sang et par la doctrine.

4. O Sang, que j’appelle éternel parce qu’il est uni à la nature divine (Quelques théologiens ont critiqué cette expression eterno sangue, sang éternel! Mais sainte Catherine l’explique elle-même, par l’union avec la nature divine, avant les siècles, dans la pensée de Dieu. C’est dans le même sens qu’il est dit dans l’Apocalypse: Agnus qui occisus est ab origine mundi (XIII, 8). Saint Paul dit: Per proprium sanguinem introivit semel in sancta aeterna redemptione inventa (Hb., IX, 12) et saint Thomas explique ainsi ce passage: Quasi dicat Per istum sanguinem redempti sumus, et hoc in perpetuum, quia virtus ejus est infinita), l’homme qui connaît votre force par la lumière, se sépare de sa faiblesse; car la lumière véritable ne s’acquiert jamais sans la haine de la sensualité, qui détruit la lumière naturelle. O Sang délicieux, vous fortifiez l’âme, vous l’illuminez, vous la rendez angélique, vous l’enveloppez de votre charité, au point qu’elle s’oublie elle-même et qu’elle ne peut plus voir que vous; la faible chair qui lui est unie sent elle-même le parfum des vertus; le corps et l’âme n’ont qu’une voix pour crier vers vous, et cela tant que leur saint désir augmente et se développe. Sitôt que le désir se refroidit, la révolte de la chair se réveille plus violente que jamais. O doctrine de vérité, vous donnez à l’âme qui vous possède une telle force, qu’aucune adversité ne peut l’abattre. Dans tout combat, elle trouve la victoire; elle est invincible tant qu’elle vous suit, parce que vous venez de la Force suprême; mais si elle ne vous suivait pas, votre force lui serait inutile. Hélas! pauvre malheureuse, je n’ai jamais suivi la vraie doctrine, et je suis si faible, que la moindre épreuve m’abat. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

Prières de Sainte Catherine de Sienne IV, V, VI

IV – Prière écrite en cinabre de la main même de sainte Catherine.

Cette prière ne se trouve pas dans la version latine.- L’original est conservé à Sienne.

Esprit Saint, venez en mon cœur attirez-le à vous par votre puissance, mon Dieu, et donnez-moi la crainte et la charité. O Christ gardez-moi de toute mauvaise pensée réchauffez-moi, enflammez-moi de votre très doux amour, et toute peine me semblera légère! Mon Père, mon doux Seigneur, assistez-moi dans toutes mes actions! Jésus amour, Jésus amour.

V – Prière faite à Rome pendant une extase qui suivit la Communion, le Vendredi 18 février 1379.

Nous donnons les dates des prières de sainte Catherine d’après l’édition de Gigli. La version latine donne celle de 1377 aux prières XIV et XV, et celle de 1378 aux prières XV, XVII, XVIII, XXIV. Sainte Catherine était alors à Sienne ou à Florence; ces prières n’ont pu être faites à Rome qu’en 1379.

1. O souveraine et éternelle Trinité, Amour ineffable, vous m’appelez votre fille, et moi je puis vous dire: Mon Père! Vous vous êtes donné à moi en me donnant le corps et le sang de votre Fils bien-aimé, qui est Dieu et homme tout ensemble! Unissez-moi aussi, je vous en conjure, au corps mystique de la sainte Église, ma mère, à la société universelle de la religion chrétienne; car le feu de votre charité m’a fait connaître le désir que vous avez de voir mon âme se réjouir dans cette union sacrée. O Amour inexprimable, vous m’avez vue et connue en vous, et ce sont les rayons de votre lumière, dont j’étais revêtue, qui vous ont passionné pour votre créature!

2. Vous l’avez tirée de vous-même, vous l’avez créée à votre image et à votre ressemblance; et moi, cependant, pauvre créature, je ne pouvais vous connaître qu’en voyant en moi votre image et votre ressemblance. Mais, afin que je puisse vous voir et vous connaître en moi, vous vous êtes uni à nous; vous êtes descendu des hauteurs de votre divinité jusqu’aux dernières infirmités de notre nature. Comme la faiblesse de mon intelligence ne pouvait comprendre et contempler votre grandeur, vous vous êtes fait petit, et vous avez caché vos splendeurs admirables sous les voiles infimes de notre humanité. Vous vous êtes manifesté par la parole de votre Fils unique, et je vous ai connu en moi-même.

3. O abîme de charité! oui, c’est ainsi, Trinité adorable, que vous vous êtes manifestée, que vous nous avez montré votre Vérité; c’est surtout par l’effusion de votre sang que nous avons vu votre puissance, puisque vous avez pu nous laver de nos fautes. Nous avons vu votre sagesse, puisque, sous la chair de notre humanité, vous avez caché la force de votre divinité, qui a vaincu le démon et l’a dépouillé de sa puissance. C’est votre sang qui nous a montré votre charité, puisque par la seule ardeur de votre amour vous nous avez rachetés, lorsque vous n’aviez pas besoin de nous.

4. Ainsi s’est manifestée votre Vérité, qui nous a créés pour nous donner la vie éternelle. Oui, votre créature a connu la vérité par le Verbe, votre Fils unique. Sans lui, elle était inaccessible à nos regards obscurcis par le péché. Rougis donc, ô créature; rougis d’être ainsi aimée et honorée par ton Dieu, et de ne pas le connaître, lui que sa charité infinie a fait descendre des hauteurs de sa gloire jusqu’à la bassesse de La nature, pour que tu le connaisses en toi. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi.

5. O mystère admirable! vous connaissiez votre créature en vous avant qu’elle fût créée; vous voyiez qu’elle devait commettre l’iniquité, qu’elle devait s’écarter de votre vérité, et cependant vous l’avez créée. O amour incompréhensible! vous me dites: Mon âme, et moi je vous dis: Mon Père! O Père si plein de miséricorde, je vous en conjure, unissez tous vos serviteurs dans le feu de votre charité; disposez-les à recevoir les inspirations et les enseignements que répand et veut répandre la lumière de votre charité.

6. Votre vérité a dit: Cherchez, et vous trouverez; demandez, et vous recevrez; frappez, et il vous sera ouvert, (Mt. VII, 7). Eh bien! moi, pauvre et misérable, je frappe à la porte de votre Vérité, je m’adresse à votre Majesté, j’implore votre clémence, et je lui demande miséricorde pour le monde, et surtout pour la sainte Église; car je sais par votre Fils qu’il faut me nourrir sans cesse de cette nourriture; puisque vous le voulez, ne me laissez pas périr de faim.

7. O mon âme! que fais-tu? Ne sais-tu pas que le Seigneur ton Dieu te voit sans cesse? Ne sais-tu pas que rien ne peut fuir son regard, et que ce qui échappe à l’œil de la créature ne peut jamais éviter le sien? Ne commets donc plus l’iniquité, et relève-toi de tes fautes. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi; il est temps de secouer le sommeil. O éternelle Trinité! vous voulez que nous avancions, et si nous ne nous réveillons pas dans la prospérité, vous nous envoyez l’adversité. Comme un habile médecin, vous brûlez avec le feu de la tribulation les plaies que n’a pu guérir le baume des consolations.

8. O Père! ô Charité incréée! je n’admirerai jamais assez ce que m’a révélé votre lumière! Vous m’avez vue et connue, vous avez vu et connu toutes les créatures raisonnables, en général et en particulier, avant que nous ayons l’être. Vous avez vu Adam, le premier homme; vous avez connu sa faute et celles qui devaient en être la suite, en lui et dans sa postérité. Vous avez su que le péché s’opposerait à votre Vérité, et qu’il empêcherait les créatures raisonnables d’atteindre la fin à laquelle vous les aviez destinées. Vous avez vu les tourments que votre Fils devrait subir pour sauver le genre humain et réparer la vérité en nous. Oui, vous me l’avez dit, votre prescience vous avait tout annoncé. Comment se fait-il, Père éternel, que vous ayez créé votre créature?

9. O mystère adorable, incompréhensible! Oui, vous n’aviez pas d’autres raisons que l’amour dans notre création; vous nous avez vus de vous-même, et votre charité vous a forcé à nous créer malgré toutes les iniquités que nous devions commettre contre vous. Vous n’avez pu résister, ô Amour éternel; vous aperceviez dans votre lumière toutes les offenses de votre créature contre votre infinie bonté, mais vous avez paru ne pas les voir, vous ne vous êtes arrêté qu’à la beauté de votre œuvre; vous l’avez aimée, vous vous êtes passionné pour elle, et vous l’avez tirée de votre sein pour la créer à votre image et à votre ressemblance. O Vérité éternelle! vous vous êtes révélée à votre indigne servante.

10. Vous lui avez appris que c’est l’amour qui vous a forcé à lui donner l’être. Vous voyiez qu’elle devait vous offenser, mais votre charité a détourné vos regards de ses offenses pour les fixer uniquement sur la beauté de votre créature; car la vue de l’offense pouvait empêcher l’amour de répandre la vie. Vous le saviez, et vous n’avez écouté que l’amour, parce que vous n’êtes qu’un foyer d’amour.

11. Et moi, mes fautes m’ont empêchée de vous connaître; mais accordez-moi la grâce, ô très doux Amour, de l’épandre en votre honneur tout le sang de mon corps; faites que je me dépouille entièrement de moi-même. Bénissez aussi, ô mon Dieu, celui qui m’a donné la sainte Communion; détachez-le de lui-même, revêtez-le de votre volonté, fixez-le en vous par des liens indissolubles, afin qu’il soit une plante répandant son parfum dans le jardin de la sainte Église. Accordez-nous, je vous en conjure, ô Père très clément, votre douce bénédiction; lavez nos âmes dans le sang de votre Fils. O Amour, Amour, je vous demande la mort!

VI – Prière faite par sainte Catherine le jour de saint Thomas apôtre.

1. O Déité, Déité, éternelle Déité, véritable Amour, qui par l’union de l’humanité de votre Verbe, Notre Seigneur Jésus-Christ, avec votre divinité, nous avez donné, quand nous étions perdus, la lumière de la foi, qui éclaire l’œil de notre intelligence pour nous faire apercevoir et connaître le véritable objet de notre âme, votre adorable Divinité. Vous avez lait de, votre Fils unique, Notre Seigneur, la victime sans tache qui devait nous réconcilier avec vous, et vous l’avez placé comme la-pierre angulaire, la colonne inébranlable de notre sainte mère l’Église, votre unique Épouse. C’est lui qui doit renouveler sans cesse l’Église par des plantes nouvelles et fécondes. Nul maintenant ne peut s’opposer à votre volonté, qui est éternelle et immuable.

2. Ne regardez pas les péchés qui me rendent indigne de vous prier, mais daignez les effacer par les mérites de saint Thomas, votre apôtre. Oui, purifiez mon âme, Dieu puissant, mon amour; exaucez votre servante qui vous invoque. Vous êtes un feu qui brûlez toujours, mais vous conservez ce qui vous est agréable, et vous ne détruisez dans l’âme que ce qui peut vous déplaire. Brûlez par le feu de votre Esprit, consumez et anéantissez jusqu’à la racine tout amour et tout désir de la chair dans le cœur des plantes nouvelles dont vous avez bien voulu parer le corps mystique de notre sainte mère l’Église. Changez leurs attachements profanes en élans d’amour pour vous; donnez-leur un cœur nouveau avec la connaissance de votre sainte volonté, afin qu’ils méprisent le monde et se renoncent eux-mêmes. Qu’ils soient remplis de ferveur; qu’ils deviennent les apôtres de la foi et les modèles de toutes les vertus; qu’ils abandonnent bien réellement les désirs trompeurs et lés richesses de ce monde périssable, pour vous suivre seul dans la pureté de l’intention et l’ardeur de la charité.

3. Faites que notre Chef et notre Père, l’époux de votre Église, soit toujours fidèle à vos inspirations; qu’il n’élève, ne reçoive et n’écoute que ceux qui en sont dignes et que ces auxiliaires nouveaux, semblables aux anges qui vous servent dans le ciel, travaillent avec votre Vicaire à rendre notre sainte mère l’Église conforme à votre cœur, par la simplicité de leur cœur et la perfection de leur vie.

4. Qu’ils comprennent qu’ils sont réellement des membres nouveaux du corps de Notre Seigneur Jésus-Christ, et que votre Providence sait en retrancher, sans le secours de l’homme, les rameaux inutiles qui ne portent pas de fruits. Qu’ils naissent avec Jésus, et croissent comme lui en vertu; qu’ils soient utiles à l’Église par leurs exemples et par leurs mœurs; qu’ils soient comme des greffes nouvelles dont la nature fait porter des fleurs plus parfumées et des fruits plus agréables. Que votre grâce céleste retranche toute affection charnelle; que la rosée de votre Esprit Saint, qui se répandit sur vos Apôtres, fasse germer en eux de nouvelles vertus. Qu’ils élèvent vers vous la suavité de leur odeur, et qu’ils donnent à l’Église la richesse de leurs vertus et l’efficacité de leurs œuvres, afin que votre Épousé soit réformée en eux.

5. O Amour éternel! purifiez, sanctifiez votre Vicaire, afin qu’il soit pour les autres un modèle de pureté et d’innocence; qu’il reste toujours fidèle à votre grâce et qu’il la communique au peuple qui lui a été confié. Qu’il convertisse aussi les infidèles par de célestes enseignements, et qu’il offre des fruits de salut à votre incompréhensible Majesté. Oui, daignez m’exaucer, mon Dieu, et recevez les actions de grâces de votre pauvre Servante, ô Dieu véritable, souveraine Bonté.