Prières de Sainte Catherine de Sienne XXV, XXVI

XXV – Prière faite à Rocca di Tentennano, chez la comtesse de Salimbeni, le 26 octobre 1378.

(Les deux dernières prières ne se trouvent pas dans la version latine.)

1. O Puissance du Père, aidez-moi; Sagesse du Fils, éclairez mon intelligence; douce Clémence du Saint Esprit, embrasez-moi et unissez-vous mon cœur. Je confesse, ô Dieu éternel, que votre puissance est toute puissante pour délivrer l’Église, pour sauver votre peuple et le retirer des mains du démon, pour faire cesser la persécution contre la sainte Église, et me donner la victoire et la force contre tous mes ennemis. Je confesse que la sagesse de votre Fils, qui estime même chose avec vous, peut éclairer mon intelligence et celle de votre peuple, et dissiper les ténèbres de votre douce Épouse. Je confesse, ineffable Bonté de Dieu, que la Clémence du Saint Esprit, que votre ardente charité veut unir et enflammer en vous mon cœur et les cœurs de toutes les créatures raisonnables.

2. Puisque vous le savez, le voulez et le pouvez, je vous adjure, par votre puissance, ô Père éternel, par la sagesse de votre Fils unique et par son précieux Sang, par la clémence du Saint Esprit, le feu, l’abîme de la charité qui a cloué et percé votre Fils sur la Croix, je vous adjure de Faire miséricorde au monde et de renouveler dans votre sainte Église l’union, la paix et l’ardeur de la charité. Oui, je ne veux pas que vous tardiez davantage. Je vous demande que votre infinie Bonté vous force à ne pas fermer l’œil de votre miséricorde sur votre sainte Épouse, doux Jésus, Jésus Amour.

XXVI – Prière faite par sainte Catherine, après le terrible accident qu’elle éprouva dans la nuit du lundi de la Septuagésime, lorsque sa famille la pleura comme morte.

1. Dieu éternel, mon bon Maître, qui avez formé le vaisseau du corps de votre créature avec le limon de la terre; ô très doux Amour, vous l’avez formé d’une chose si vile, et vous y avez mis un si grand trésor, l’âme faite à votre image et ressemblance, ô Dieu éternel! Oui, mon bon Maître, mon doux Amour, vous êtes le maître de faire et de refaire, de briser et de refondre ce vase fragile comme le voudra votre Bonté.

2. O Père, moi votre misérable servante, je vous offre de nouveau ma vie pour votre douce Épouse. Vous pouvez, toutes les fois que le voudra votre Bonté, me séparer de mes sens et m’y ramener toujours d’une manière de plus en plus douloureuse, pourvu que je voie la réformation de votre douce Épouse, la sainte Église.

3. Je vous recommande cette Épouse, Dieu éternel; je vous recommande aussi mes fils bien-aimés, et je vous prie, ô Père suprême, s’il plaît à votre miséricordieuse bonté de me retirer enfin de mon corps, je vous prie de ne pas les laisser orphelins, mais de les visiter par votre grâce et de les faire vivre morts dans la vraie et parfaite lumière. Unissez-les ensemble par les liens de votre douce charité, afin qu’ils meurent anéantis dans cette douce Épouse.

4. Je vous prie, ô Dieu éternel, qu’aucun ne me soit ravi: pardonnez nous toutes nos fautes; pardonnez-moi mon extrême ignorance et la grande négligence que j’ai à me reprocher envers votre Église, puisque je n’ai pas fait tout ce que j’aurais dû et pu faire pour elle. J’ai péché, Seigneur, ayez pitié de moi; je vous offre et vous recommande mes fils bien-aimés, car ils sont mon âme; et, s’il plaît à votre Bonté de me faire rester dans mon corps, Médecin suprême, guérissez-le, réparez-le; car il est tout déchiré. Donnez, Père éternel, donnez-nous votre douce bénédiction. Ainsi soit-il.

Appendice

Dieu frappe à la porte de la volonté de Marie
« O Marie, tu deviens le livre dans lequel aujourd’hui est écrite notre règle. En toi, aujourd’hui, est écrite la sagesse du Père éternel; en toi, aujourd’hui, se manifeste la force et la liberté de l’homme.
Si je considère, Trinité éternelle, ton grand dessein, je vois que dans ta lumière tu as vu la dignité et la noblesse de la race humaine; et ainsi, comme l’amour te contraignit à tirer l’homme de toi-même, ce même amour te contraint à le racheter, car il s’était perdu. Tu as montré de façon admirable ton amour pour l’homme avant même que celui-ci n’existât, quand tu as voulu le tirer de toi-même uniquement par amour; mais tu lui as montré un plus grand amour en te donnant toi-même, en t’enfermant aujourd’hui dans la fragilité de son humanité. Que pouvais-tu lui donner de plus que te donner toi-même? C’est donc en toute vérité que tu peux lui dire: «Qu’aurais-je dû ou qu’aurais-je pu faire pour toi que je ne l’aie fait?»
Ainsi, je vois que ce que ta sagesse, en ce grand et éternel dessein, a vu devoir être fait pour le salut de l’homme, ta clémence a voulu le faire et, aujourd’hui, ta puissance l’a réalisé.

Quelle façon as-tu trouvée, Trinité éternelle, pour que, fidèle à ta vérité, tu fis miséricorde à l’homme et que toutefois ta justice fût satisfaite? Quel remède nous as-tu donné? Oh, le voici, le remède adapté: tu as déterminé de nous donner le Verbe, ton Fils unique; tu as voulu qu’il prit le poids de notre chair qui t’avait offensé, pour que, en souffrant dans cette humanité, il satisfasse à ta justice, non en vertu de l’humanité, mais en vertu de la divinité qui lui est unie. Et ainsi fut accomplie ta vérité et furent satisfaites la justice et la miséricorde.

O Marie, je vois ce Verbe qui t’est donné être en toi et néanmoins il n’est pas séparé du Père, de même que la parole que l’homme a dans l’esprit, bien que proférée et communiquée aux autres, ne le quitte pourtant pas et n’est pas séparée de son cœur. En tout cela se manifeste la dignité de l’homme, pour qui Dieu a fait de si grandes choses.

En toi, Marie, se manifestent aussi, en ce jour, la force et la liberté de l’homme, puisque, après la décision de réaliser un si grand dessein, un ange t’est envoyé pour t’annoncer le mystère du dessein divin et chercher l’approbation de ta volonté; et le Fils de Dieu ne descend pas en toi avant que tu n’y consentes par un acte de ta volonté. Il attendait à la porte de ta volonté que tu lui ouvres parce qu’il voulait venir en toi; et il n’y serait jamais entré si tu ne lui avais pas ouvert en disant: Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole.

O Marie, la divinité éternelle frappait à ta porte; mais, si tu n’avais pas ouvert la porte de ta volonté, Dieu ne se serait pas incarné en toi.
Honte à toi, ô mon âme, qui vois qu’aujourd’hui Dieu, en Marie, a établi avec toi des liens de parenté. Aujourd’hui il t’est montré que bien que tu aies été créée sans toi, tu ne seras pas sauvée sans toi.
O Marie, mon doux amour, en toi est écrit le Verbe qui nous donne la doctrine de vie; et toi, tu es le livre qui nous présente cette doctrine. »

Des Orations de sainte Catherine de Sienne, O.P.
(Écrite pour le jour de l’Annonciation 1379)

Préparé par l’Institut de Spiritualité:
Université Pontificale Saint Thomas d’Aquin
Embrasse Jésus abandonné, aimant et aimé

« Chère sœur en Jésus. Moi, Catherine, servante des serviteurs de Jésus, je t’écris en son précieux sang, désireuse que tu t’alimentes de l’amour de Dieu et que tu t’en nourrisses, comme au sein d’une douce mère. Personne, en fait, ne peut vivre sans ce lait!

Qui possède l’amour de Dieu, y trouve tant de joie que chaque amertume se transforme en douceur, et chaque fardeau devient léger. Il ne faut pas s’en étonner, parce que, en vivant dans l’amour, l’on vit en Dieu: “Dieu est amour; qui est dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui”.

Vivant en Dieu donc, on ne peut avoir aucune amertume, parce que Dieu est délice, douceur et joie infinie!

Voilà pourquoi les amis de Dieu sont toujours heureux! Même si nous sommes malades, pauvres, affligés, tourmentés, persécutés, nous sommes dans la joie.

Même si toutes les langues médisantes parlaient mal de nous, nous ne nous en préoccuperions pas; mais nous nous réjouissons de toute chose et sommes heureux, parce que nous vivons en Dieu, notre repos, et nous goûtons le lait de son amour. Comme l’enfant tête le lait du sein de sa mère, nous aussi, amoureux de Dieu, puisons l’amour en Jésus crucifié, en suivant toujours ses traces et en cheminant avec lui sur la voie des humiliations, des peines et des injures.

Nous ne cherchons pas la joie sinon en Jésus, et nous fuyons toute gloire qui ne soit pas celle de la croix.

Embrasse donc Jésus crucifié, en élevant à Lui le regard de ton désir! Contemple l’amour enflammé pour toi, qui a conduit Jésus à verser son sang par tout son corps!

Embrasse Jésus crucifié, aimant et aimé, et tu trouveras en lui la vraie vie, parce qu’ Il est Dieu qui s’est fait homme. Que ton cœur et ton âme brûlent du feu de l’amour, puisé en Jésus en croix!

Tu dois ensuite devenir amour, en regardant l’amour de Dieu, qui t’a tant aimée, non parce qu’Il avait quelque obligation envers toi, mais par pur don, mu seulement par son ineffable amour.
Tu n’auras pas d’autre désir que de suivre Jésus! Comme ivre de l’Amour, tu ne feras plus attention au fait d’être seule ou en compagnie: ne te préoccupe pas de tant de choses, mais seulement de trouver Jésus et de le suivre!
Cours donc, Bartoloméa, et ne reste plus à dormir, parce que le temps passe vite et n’attend pas un seul instant!
Reste dans le doux amour de Dieu.
Doux Jésus, Jésus amour. »

Des “Lettres” de Ste Catherine de Sienne (1347-1380)
(lettre n. 165 à Bartolomea, épouse de Salviato de Lucque).

Prière

O Amour inestimable! Tu nous illumines de ta sagesse, pour que nous puissions nous connaître nous-mêmes, connaître ta vérité et les ruses subtiles du démon.
Par le feu de ton amour, allume en nos cœurs le désir de t’aimer et de te suivre dans la vérité.
Toi seul es l’Amour, digne seulement d’être aimé!

(de Ste Catherine de Sienne)
FIN DU DIALOGUE